Divers > [Federalis] Derrière le boost...
Auteur : Aurel
13/12/07 18h10 | 2 Aquan 3726
L'homme entra dans le vestibule et referma la porte derrière lui, bannissant le vent hurlant et la neige qui s'engouffraient déjà à l'intérieur. La jeune femme postée derrière l'accueil leva un sourcil interrogateur.
Bonjour, j'aimerais rencontrer Monsieur Fraktosky.
Désolée, répondit-elle sèchement, Monsieur Fraktosky ne reçoit pas.
Le visiteur enleva le lourd manteau dans lequel il était emmitouflé et le posa négligemment sur une chaise. L'hôtesse reconnut alors un des notables de la Fédéralis, Delmeth, un ami de la dirigeante de l'Assianta si elle avait bien compris. Il s'observa un instant dans un grand miroir accroché au mur, ajusta son costume, et reprit avec un sourire charmeur :
J'ai bien peur que Monsieur Fraktosky soit forcé de faire une exception pour moi ; j'ai l'autorisation expresse de Dame Kalyso pour rencontrer qui bon me semble dans l'administration et l'industrie de l'Assianta, et il s'avère que j'aimerais partager quelques informations avec lui.
Excusez-moi, Seigneur Delmeth, lui répondit l'hôtesse embarrassée, mais Monsieur Fraktosky est malade. Une vascularite cryobo... cryogo... cryoglobulinémique aigüe l'empêche de recevoir depuis plus d'un mois maintenant. Vous comprenez, avec les risques de contagion...
Vous m'en voyez navré pour lui. Qui donc gère ses affaires à sa place ?
Oh, Monsieur Fraktosky continue à diriger notre groupe, mais sans jamais quitter son logement de fonction. Vous ne devriez pas insister, il s'en voudrait mortellement si vous tombiez malade à cause de lui.
Je vous remercie de vous inquiéter pour moi, répondit Delmeth en souriant, mais je dois vraiment le rencontrer. Quel étage ? demanda-t-il en s'engouffrant dans l'ascenseur.
Seigneur Delmeth, Monsieur Fraktosky a vraiment insisté pour que...
Quel étage ?
Dix-huitième... Précisez-lui bien que je vous ai mis en garde, s'il vous plaît, Monsieur Fraktosky déteste qu'on ne suive pas ses instructions. Enfin, je suppose qu'avec vos relations avec Dame Kal...
La porte de l'ascenseur s'était refermée. Delmeth soupira en s'adossant contre la paroi de la cabine. Tout cela était très étrange... Il avait tenté de contacter huit des principaux responsables de l'industrie de l'Assianta, et n'avait pu en rencontrer que deux. Tous les autres étaient partis en voyage, portés malades, ou indisponibles pour des raisons diverses. Cette étrange hécatombe était plutôt étonnante, alors que l'économie de cet Etat, et de ceux de la Federalis en général, ne s'était jamais aussi bien portée.
Tant et si bien que Delmeth avait finalement décidé de tirer tout cela au clair. Ses études des livres de comptes ne lui suffisaient plus, et il refusait de se contenter comme les autres Federalis de hausser les épaules et d'accepter leur miracle économique. Non, quelque chose devait se passer derrière tout cela. Ils n'étaient pas devenus si performants sans raisons, et Delmeth se refusait à croire que leur productivité ne tenait lieu qu'à leur formidable entente.
L'ascenseur s'arrêta devant la porte de l'appartement de Fraktosky, président directeur général d'un des plus importants groupes de l'industrie high-tech de l'Assianta. Delmeth s'assura une nouvelle fois que sa tenue était impeccable, ses longs cheveux noirs bien en place, et sonna. Après quelques dizaines de secondes, il sonna de nouveau, sans plus de réponse. Le jeune homme soupira, jeta un bref coup d'oeil à la caméra de surveillance fixée dans un angle de l'ascenseur, et la débrancha d'un geste sec. Il descella la serrure électronique qui fermait l'appartement, dénuda certains fils électriques et les relia à son communicateur, avant de contacter un de ses amis.
Aurel.
Delmeth. J'ai besoin de ton aide pour pirater une serrure, modèle XS15-23.
Tss... Qu'es-tu encore en train de faire ?
Si tu pouvais faire vite, cela m'arrangerait beaucoup.
Ouais, ouais, je t'envoie un petit programme qui, si tout...
Merci. J'attends.
Moins d'une minute plus tard, la porte de l'appartement de Fraktosky céda. Delmeth pénétra prudemment dans le vestibule plongé dans les ténèbres et attendit quelques instants que ses yeux s'accoutument à l'obscurité. Un étrange sentiment de malaise s'empara de lui, sans qu'il puisse en expliquer la cause. Le jeune homme avança à pas précautionneux, cherchant le maître des lieux. A première vue, l'appartement semblait avoir été abandonné depuis des semaines. La poussière commençait à s'entasser sur les meubles. Le ménage ne devait pas être fait très souvent...
Delmeth progressa plus avant dans le couloir, ouvrit une porte au hasard. Il était dans une sorte de salon. Même constat, personne n'était passé par là depuis longtemps. Le malaise du jeune homme s'accentuait. Il sentait une étrange odeur, qui rappelait vaguement l'huile de moteur, mais en plus fin, plus subtil. Et cette odeur semblait éveiller en lui des souvenirs, sans qu'il parvienne à comprendre ce qu'elle lui rappelait. Plus il avançait, plus l'odeur devenait tenace, et plus il se sentait mal.
Enfin, il aperçut un rai de lumière sous une porte. S'approchant de plus en plus lentement, il jeta un coup d'oeil par l'embrasure. Alors, il se figea.
Il comprit.
D'un seul coup, la signification de l'odeur sentie plus tôt devint claire. D'un seul coup, Delmeth sût que Fraktosky était mort depuis longtemps. D'un seul coup, Delmeth comprit la raison de la production si rapide des Etats de la Federalis.
Et cela le remplit de terreur.
Nooooooooooooon ! hurla-t-il, voyant ses cauchemars devenir réalité.
Pris d'une panique aveugle, le jeune homme habituellement si calme et si peu émotif fit volte face et courut de toute la vitesse de ses jambes jusqu'à l'ascenseur.
La porte claqua devant lui avant qu'il ne l'atteigne. Affolé, il se jeta contre elle, tentant de l'enfoncer, de fuir l'horreur qu'il avait découverte. Il frappa la porte, la griffa, tenta de la détruire à coups de tête, mais elle tenait bon. Delmeth se laissa glisser au sol, sanglotant comme un enfant, tendis qu'il entendait son cauchemar de toujours s'approcher. L'odeur se faisait de plus en plus forte. Les souvenirs de plus en plus vivaces. Le jeune homme s'effondra au sol, sans connaissance.
~ ~ ~
Alors Delmeth, toujours passionné par le mystère de nos puissantes économies ?
Le jeune homme reposa son verre en souriant.
Tu sais, Kaly, finalement je doute qu'il y ait quoi que ce soit derrière notre puissance. Nous sommes simplement d'excellents gestionnaires...
La jeune femme éclata de rire.
Pourquoi ce changement ? Il y a deux jours tu me soutenais encore que quelque chose ne tournait pas rond, que tu voulais tirer tout ça au clair, que tu n'aurais pas de repos tant que tu n'aurais pas compris ?
Mais qu'est-ce que tu racontes, Kaly ? Je n'ai jamais douté de nos capacités !
Alors, c'est ta rencontre avec Fraktosky qui t'a convaincu ?
Je n'ai pas pu le voir, il est malade. Heureusement qu'on est derrière lui pour s'assurer que son groupe continue à être productif...
Oui, heureusement que nous sommes là... Jamais l'Assianta ne s'est aussi bien portée.
On dirait bien, Kaly, que tout va pour le mieux, répondit Delmeth, un sourire éclatant sur le visage.