Lievanta > Révoltes

Auteur : Kalyso
14/05/06 17h51 | 24 Volcan 3724

Des cris, du sang, une odeur de pisse et de rouille. De la mauvaise bouffe, parfois pas du tout. Ca c’est notre quotidien. Un esprit de révolte, la réalisation de la moindre connerie, notre raison de vivre.
Qui sommes nous ? Nous sommes ces mômes des rues, ces gamins de Lievanta, la si grande, si belle Lievanta, cité magnifique et pourrie jusqu’à la moelle : de la pourriture partout, où qu’on aille. Dans ses égouts autant que sur ses murs, semée dans sa terre autant que dans le cœur de son peuple.

C’est désespérant. Non pas que le système soit mauvais, non, comme toujours, le gouvernement « nous veut du bien ». Mais nous, on trinque.

Il y a une dizaine d’année, il y a eu la Grande Révolte. Les quartiers pauvres se sont enflammés, les écarts se sont creusés, d’avantage, jusqu’à ce qu’un gouffre sans fin nous sépare tous.

Puis il y a eu la mort de ce pauvre gosse. Pseudo délinquant en quête d’un mérite illusoire que lui apporterait une brillante action anarchiste.
Cette action a eu lieu. La famille d’un ministre séquestrée et torturée à mort.
Quand les flics ont chopé le gosse, ils se sont défoulé : baissant les bras, l’état leur en avait donné la permission.
A lui tout seul il a payé les insultes, les pierres, les dégradations, les humiliations….

L’embrasement qui suivit fut de courte durée, mais vif. Des morts, encore et toujours. Du sang, des flammes.

L’état a finalement resserré les vis. Ces vis ont pris la forme de murs, de grillages. La population a suivi, sans rien dire, trop heureuse d’avoir de nouveau un substitut de paix.

Maintenant il n’y a plus de tolérance. Les fouteurs de merde, en taules. Trop jeunes ? Un foyer.
Pas de pitié, pas de pardon.

Les gamins fuient, se regroupent, subissent et partent en guerre.
Hier encore j’ai vu une fillette, je suis sure qu’elle mouille encore ses couches et ne connaît pas son alphabet (le connaîtra t-elle un jour ?) marcher vers la « frontière », cette limite qui nous sépare des gens normaux, comme il faut, armée d’un fusil de fortune.
La police peut frapper. Elle n’hésite plus d’ailleurs.
Nos maisons, ce sont les dépouilles dégueulasses des beaux quartiers d’antan. On mange ce qu’on peut, quand on peut. On s’organise, on se bat. Une mini société parodique de la grande en somme. Formée des enfants cachés, de la honte de la ville.

Le chef de mon groupe, c’est Keld. Le grand gars le bas. Vingt deux piges et il croit tout connaître de la vie. A vrai dire, il n’en parle pas beaucoup, de sa vie. Il lutte. Une chose est sure, il hait cet endroit et fera tout pour le foutre en l’air. Je crois qu’il a été de la Grande Révolte, qu’il a effleuré tout ça.
C’est comme un grand frère. Les petits se cachent près de lui, les grands lui demandent conseil. Il est cool.

Moi je suis Sistra. Dix Sept ans. Je me rappelle à peine d’avant. Ce que je sais, c’est que je suis passée par les mailles de la Grande Révolte, pour finir dans un foyer. C’est Keld qui m’en a sortie, lors d’une de ses missions. Des fois, je me dis que la vie est meilleure intra muros, mais pour rien au monde je ne les abandonnerai.

L’unique chose que je veux, c’est que tout redevienne comme avant. Oh je n’ai pas peur. Je sais me défendre, et la compagnie d’une famille ne m’est pas indispensable. Mais la chaleur d’un foyer me manque. Un amour sincère, un regard inquiet.
Ici je peux crever dans un caniveau, on me retrouvera dans deux semaines à l’odeur.

Six coups. L’horloge de Lievanta réveille ses fiers habitants. Nous on guette. Dans quatre minutes, ils se lanceront, dérisoires soldats aux cœurs brisés.
Aujourd’hui, j’assure les arrières. J’ai l’air fine avec mon fusil quatre fois plus lourd que moi.

Et les voilà qui s’avancent, Davids contre un Goliath indétrônable. Ils le savent : leurs chance sont réduites, mais ils en ont besoin.

Cela se terminera t-il un jour ?

Auteur : Keld
14/05/06 17h51 | 24 Volcan 3724

Nuages noirs, pluie sale, ordures… Une nouvelle journée dans le Pays du Bonheur. Mais aujourd’hui sera une belle journée : aujourd’hui, encore, nous allons hurler à la face du monde. Nous n’espérons pas vaincre, ni même être entendu. Les émeutes ne visent plus à changer les choses, ni même à protester, mais simplement à ne pas sombrer dans le désespoir. Brûler, piller, se battre, c’est simplement prouver rageusement qu’on existe.

Je serre mes lacets, misérables ficelles récupérées sur un emballage… Mes rangers doivent tenir. J’enfouis du papier journal sous mon blouson, dérisoire armure contre une matraque, mais c’est mieux que rien… J’empoigne le drapeau noir, les autres se distribuent les cocktails.

On a passé la nuit à mélanger de l’essence et de la gélatine alimentaire dans des bouteilles en verre. Les pantins de notre gouvernement préféré vont avoir une surprise, cette fois… Le napalm, ça chauffe et ça colle.
Je me tourne vers « le gang ». Visages fermés, maigres, et durs. Les plus vieux ont connus la grande émeute. On est pas des soldats, pas des révolutionnaires romantiques et idéalistes. On est que de la merde, que les résidus sales qui s’accrochent au fond de l’évier de la société une fois qu’on l’a vidé. Mais ce genre de résidus là ne part pas avec un seul coup d’éponge. Ils vont devoir méchamment gratter pour nous avoir.

L’horloge sonne. Le signal. Les gangs se sont donnés rendez vous, via le bouche à oreilles, les tags, le cybernet. La police anti-émeute sera là, aussi. Ils sont toujours là : ce ne sont pas les taupes qui manquent, prêts à vendre leur gang pour un repas chaud. J’arrive même pas à leur en vouloir. Sans un mot, sans un discours, on se lève. Pas besoin de jolies phrases pour aller au charbon.

La Grand Place du Parlement est déjà pleine d’AE, comme on appelle les anti-émeutes. Uniformes noirs en kevlar, casques, masques à gaz, boucliers, matraques et fusils à grenades lacrymo. Des durs. On les aimes pas trop, mais y a pas de haine : ce ne sont que des pantins qui font ce qu’ils croient être leur devoir. Et de toute façon, on a même plus assez de sentiments pour ressentir ça. Sur la grande avenue, je vois un pépin : des gardes mobiles. Cela, ils bossent par deux, sur un gros quad renforcé : un qui conduit, l’autre qui matraque. Ils tuent souvent, même sans le vouloir.
Petit à petit, les gangs arrivent. Ca va être chaud, on est plein…
Je regarde le ciel gris qui me pisse dessus en retour, et je souris. Une bien belle journée. Les deux groupes se font face… Rangs impeccables de poulets, horde sale et hirsute de zonards. Puis, sans le moindre signal, c’est la charge. Barre à mine contre matraque, cocktails molotov contre lacrymo, fusils artisanaux contre flashball… Le Grand Cirque commence…

Adrénaline, peur au ventre… Je vois un poulet sonné devant moi… Un coup de barre à mine de bas en haut pour relever sa visière, un autre dans le visage… Ca craque… Dents ou os, vu comment il gueule, je dois pas l’avoir loupé. A côté de moi, un ganger se fait passer à tabac par trois flics… Plutôt lui que moi !
Devant ! Une trouée ! Je cours comme un barge… Je me prends un coup de matraque dans les jambes. Ca fait mal, et je tombe, mais après un roulez boulé, je repars. L’adrénaline et la peur me font tenir, je dérouillerais plus tard…
Ca y est, j’ai dépassé la mêlée ! Je suis sur le parvis du Parlement. Les flics ont trop à faire avec les autres pour m’arrêter, et je me retrouve seul, complètement désorienté. Sistra, une des gamines du gang me rejoint, elle a dut réussir à se faufiler. Elle a l'air débile, avec son énorme fusil; je souris. Je reprends mes esprits, et elle m'aide à lèver mon drapeau. Ca encourage les gangs, la bannière noire du nihilisme devant le Parlement, qui redoublent de violence. Les flics sont indécis, et se laissent déborder. Plus rien entre la foule et les connards qui nous dirigent. Les émeutiers courent vers moi, me dépassent, et se ruent dans le bâtiment. Hébété, je reste là, comme un imbécile, sans remarquer les journaleux qui nous filment. Mais Sistra les a vu, et jette leur caméra au sol, avant de la piétiner. Interdit, je comprends que sa tronche sera dans tous les journaux demain : moi, je suis masqué.

Puis, c’est le drame. Crépitement, cris, odeur de cordite. Dans mon cerveau embrumé, l’image de flics armés de fusil mitrailleur se forment, et prend vie devant moi… La foule reflue, mise en fuite, poursuivie par des flics qui font l’impensable. A la baillonette et à la balle réelle, ils nous tuent… Entraîné par la foule paniquée, je me laisse balloter. Je sens une petite main chaude se glisser dans la mienne, et la serrer fort : Sistra, le visage plein de larmes, les yeux débordant d’incompréhension. On court, je la lâche pas. Devant nous, sur la place, des flics en renfort nous encerclent. Comment ils ont pu arriver aussi vite ?

Je hurle, de rage, de désespoir… Je veux pas me faire prendre ! Sistra me crie quelque chose, en me montrant un des coins de la place. Je comprends, il y a un espace vide, une petite fenêtre vers la liberté. On court, on se fait piétiner, mais on sort. On court encore, jusqu’à s’effondrer. On est à nouveau dans les bas quartiers. On s’abrite dans un vieux buldozer au milieu d’un chantier abandonné. Sistra claque des dents, de peur comme de froid, et n’arrive plus à respirer. Doucement j’entrouvre mon blouson, et la serre contre moi. Elle se tortille un peu, et se blottit contre moi. Je sens ses bras se glisser dans mon dos, et sa poitrine se coller à la mienne. Je rabats mon blouson autour d’elle. Au moins, elle est au chaud. Elle doit être bien, vu qu’elle s’endort aussi sec. Putain de môme. Ma jambe me fait mal, et j’ai envie de pisser. Mais bon, elle a bien mérité de dormir un peu. Alors, pour pas pleurer comme un crétin, je tourne et retourne dans ma tête ce qui s’est passé. On s’est fait enflé… Je me dis qu’il faudra que je regarde l’holo TV dans un bar, ce soir…

Auteur : Kalyso
14/05/06 17h54 | 24 Volcan 3724

mhhh

Les paysages ensolleillés, la chaleur, la bienséance, laissent place au froid, au gris et à la douleur. De sa main durcie par notre vie difficile, il me caresse doucement le front, retirant mes cheveux de mes yeux. Comment fait il pour rester si serein? Il me sourit et me repousse, toujours en douceur, contre un grillage. Celui ci tremble sous mon poids, ajoutant un instrument de plus à l'éternelle musique qui berce nos journées. Le bruit meurt vite et nous nous levons. Tout à l'air calme, les derniers combattants persistent dans leurs vains espoirs de changer le monde. Les deux camps ramassent leurs morts. Putain de merde, ça c'est notre vie...

Près de moi, Keld se lève. Il boitille jusqu'à un des hauts murs qui épargnent au beau monde la vision de notre décadence, et pisse dessus. La pudeur? Il n'y en a pas. Nous nous sommes tous déjà vus tels que nous sommes, nus. Nous n'avons pas le choix....
Tout ça me rappelle une horde d'animaux sauvages.

Sis, je rentre, tu viens?


Sis... Malgré moi, je frissonne chaque fois qu'il m'appelle ainsi. C'est étrange, je ne sais pas ce que je ressens pour lui. Dans les bouquins qu'on a trouvé un peu partout dans les immeubles, ça pourrait être défini comme de l'amour. Moi je ne vois pas cela ainsi, je ne peux l'aimer, il est trop bien pour moi. Alors j'en fais mon frère, mon confident. Je plaisante sans cesse avec lui à ce sujet, pour éloigner les soupçons. Et j'oublie ce que je ressens.

Je... Non je vais rester un peu. Récupérer des munitions, voir s'il y a à manger dans leurs poches... Keld, tu saignes!!

Toi aussi.


Je glisse ma main sur mon visage. Il a raison. Je n'avais même pas senti l'épais liquide se répandre sur mon front.

Besoin d'aide pour rentrer les vieux??


D'un même mouvement, nous nous retournons. C'est Bratt, un sale chenapan mais un brave garçon. Il a à peine douze ans et est pour ainsi dire né dans cette merde. Il connait les rues comme ses poches et s'amuse d'un rien.

Va te faire foutre Bratt.

Moi aussi je t'aime Sis.


Keld soupire de découragement devant nos répliques enfantines et prend le chemin de la maison.

Faites attentions à vous, il y a encore des AE qui trainent... quelle bande de charognards...

Nous regardons sa haute silhouette s'éloigner et prenons le chemin du champ de bataille. Quelques tirs résonnent encore mais nous ne risquons rien.

Hey Sis, le premier de l'autre côté!

Keld va nous tuer....

T'as peur?


Et nous nous élançons en riant, redevenant les enfants que nous sommes. Le mur est raide et je dois l'aider à passer par dessus. Ces petites escapades dans la belle ville sont toujours des moments de bonheur. Bratt et moi sommes les plus petits, nous enfuir est plus simple, donc nous en profitons.
Courant toujours nous traversons les belles rues goudronnées, rions devant les vitrines. Sans raison, juste pour nous calmer. Puis nous nous arrêtons devant une fontaine, essoufflés.

Bon on commence par quoi?

Tu es sur que c'est prudent?

Les flics sont occupés à ramasser leurs potes


Il part d'un grand rire qui résonne dans la rue vide.
Comment un endroit peut il tant manquer de vie? A la tombée de la nuit, les bruits de cette partie de la ville se rarifient et disparaissent. Notre trop proche présence effraye les riverains, mais l'argent est maître en ce lieu, et tout est moins cher près de l'ennemi.
Nous trouvons l'endroit paradisiaque. Pour ses habitants ce n'est qu'une seconde zone. Plus on a, plus on veut, c'est bien connu.

Bon, je m'occupe de la nourriture, toi des vêtements.

Non mon cher, cette fois ci, c'est moi qui m'occupe de la nourriture. Je ne veux pas encore manger de la pate sucrée pendant un mois...

Qu'est ce que t'es vieux jeu...

File. Rendez vous au pied du mur dans une heure.


Et nous partons, chacun de notre côté. D'abord je vais aller faire un tour chez Blemp. C'est un brave type. Il a connu la Grande Révolte, il nous a même rejoint un certain temps. Puis il est revenu entre les murs, dans la prison dorée. Il nous aide pas mal. Si des gosses veulent revenir, il se charge d'eux. Son magasin a à deux reprises assuré notre survie.

Hey Sistra! Tu as changé. Me dis pas que tu étais dans l'émeute... J'ai entendu les cris d'ici. Comment va Keld?

Je lui saute au cou

Tu t'inquiètes trop. Keld va bien. Tout le monde va bien.

Nous bavardons quelques instants et je pars. Dans une demi heure je dois repasser chercher les affaires qu'il aura préparées pour nous. Maintenant, c'est l'heure de la fauche. Si je me fais choper, je suis dans la merde. Mais bon, la fin justifie les moyens.

Je retrouve mon petit Bratt près du mur, couvert d'une couche de fringues qui le grossit d'au moins un mètre.

Passe en premier, je te lance les affaires.

Hey, t'es folle, s'il t'arrive quelque chose, Keld va me tuer!

Si tu passes pas ce mur, c'est moi qui vais te tuer...


Il s'exécute en riant. Tout se passe bien, je lui lance les affaires une à une, jusqu'à ce que des cris se fassent entendre.

Petite chienne!


Je n'ai que le temps de crier à Bratt de fuir, et je pars de mon côté. Les flics me suivent mais je les sème vite. J'attends la nuit sous une caisse de bois humide et me faufile par dessus le mur. En chemin je ramasse des choses sur les corps abandonnés là.

Enfin les premières lumières de notre ville à nous sont allumées partout. Un vieil horodateur m’indique qu’il est minuit passé. Par les fenêtres aux rideaux déchirés, je vois des visages curieux qui m’observent. Je souris à la silhouette des gardiens improvisés et m’avance, pliant sous le poids des divers objets que j’ai pu sauver, vers le bar où nous nous réunissons les soirs froids comme aujourd’hui. Pourvu que Bratt soit rentré directement…

C’est lui qui m’ouvre la porte. Il y a peu de monde à cette heure là. Les conversations sont tournées vers la bataille. Une télévision, rescapée de la Grande Révolte est allumée dans un coin. Keld suit les informations. Il ne se retourne pas à mon approche. Je lis un timide « désolé » sur les lèvres de Bratt – qui a retrouvé son allure squelettique - et comprends que je vais avoir droit à des remontrances.

Hey, alors quoi de neuf ? On est passés aux infos ?

Auteur : Keld
14/05/06 17h55 | 24 Volcan 3724

Je les regarde s'éloigner... Dépouiller des coprs... C'est nécessaire, mais j'y arrive pas. Fierté mal placée? Vestige de respect? Va savoir. Je fouille dans mes poches, et sors une vieille clope tordue, pas trop détrempée. Je sors aussi un billet de 5 shinyens. Je rentre dans un bar, au hasard, et commande un café. Puis, je fonce aux toilettes, me refaire une mine: dans le miroir, je vois que j'ai une gueule à faire peur. J'essui le sang et la crasse, remets un peu d'ordre dans mes cheveux, et retourne devant mon café. La serveuse est jeune, belle. Je la mate sans pudeur, puis focalise mon attention sur l'holo TV. Sans surprise, je vois l'émeute, le visage de Sistra, puis le présentateur annonce que le Grand Conseil s'est réunit en scéance plenniaire exceptionnelle. Pas bon. Je paye mon café, et ressort dans la rue. Maintenant que Sistra est fichée, on est grillé.

Je galope jusqu'à notre squat aussi vite que ma jambe raide le permet. Personne, heureusement. Je ramasse une bombe de peinture et écrit en gros "DISPERSION" sur un mur. Maintenant, chacun pour soi, en attendant que ca se calme. Je farfouille dans mes affaires: je sors un couteau, un paquet de clopes, mon sac à dos et 20 shinyens en pièces. Sans un regard, je sors. Il est temps de réfléchir... Je déambule dans les rues de la Zone, essayant d'ignorer la douleur et la pluie. J'ai bien une planque... Mais j'ai pas envie que d'autres la connaissent. Mais je peu pas lâcher Sistra comme ca; elle me plait bien, quelque part. Je me décide: si elle est dans le bar habituel avant la fermeture, je l'y emmene, et elle seule. Sinon, c'est qu'elle s'est déjà fait prendre, ou que ca tardera pas, et je m'en lave les mains.

En bordure des bas quartier, aux alentours du mur, il y a des magasins, des bâtiments un peu plus présentables: c'est ici que vivent ceux qui ont l'espoir de mettre assez de côter pour rallier les beaux quartiers. C'est là que les journaleux vont filmer les pauvres, pour donner l'impression que c'est pas si terrible. Je vais là pour faire quelques courses: du pain dégue sous vide, un peu de pseudo viande, un paquet d'allumettes. La base. Puis, je vais me planter dans "notre" bar.

C'est un endroit moche, sale, mais on n'y posent pas de question, et ils ont de la bière. Je prends un demi, et refait mes comptes. Plus que 12 shinyens. Bah, je me referais plus tard. Je regarde l'holo TV. La scéance du Grand Conseil est finie, et le Connard en Chef va annoncer les mesures. Ma gorge se noue, j'ai peur. L'étrangeté des évenements, cette scéance trop rapide, ça sent le coup fourré... Le présentateur montre les images d'une manifestations de rupins des beaux quartiers protestants contre la violence, et demandant à l'Etat "la sécurité". Manipulation? En tout cas, je sens venir le truc. Ils nous ont déjà fait le coup.

Costard impec', drapeaux... Voilà notre dirigeant bien aimé, la soixantaine sportive et bien bronzé. Il parle, j'écoute. J'ai le vertige, mais je comprends les mots "peuple entendu", "sécurité", "plus de sauvages", "armée", "balles réelles", "tolérance 0". On est vraiment enflé, là...
Après cette annonce, les journaleux nous montrent le soulagement des rupins qui habitent à 200 bornes des bas quartiers devant "leur sécurité retrouvée". Sans rire, ils ont déjà vu un zonard ailleurs qu'à l'holo TV? Je me renfrogne, et patiente. Le bar ferme à 1 heure.

Vers minuit, le petiot arrive, suivit de près par Sistra. Elle a l'air désolée, mais je m'en fou. Je la chope par un bras, et l'entraîne dehors, en hurlant un "dégage, c'est pas bon" à Bratt. J'entraîne Sirsa vers un pont du métro, vers un accès ni gardé, ni surveillé au monde sousterrain. Ma planque est là, et on sera tranquille un moment. Je la sens se dégager de mon emprise, et se tourner vers moi, l'air inquiète. Fais chier, j'ai pas envie de m'expliquer.

Auteur : Kalyso
14/05/06 17h58 | 24 Volcan 3724

Hey ça va pas ? Qu’est ce qu’il se passe ?

Ca va chier cette nuit…

Ah. Et tu m’expliques où on est ?

L’ancien métro. Tu vois le « Somptueux » ?

L’hôtel où tu bossais l’année dernière ?

Oui

Oui je vois

Il y a eu un éboulement, un mur s’est peté la gueule et m’a amené ici, dans l’ancien métro de Lievanta. J’ai fait passer une conduite d’eau, de l’électricité. C’est mon petit chez moi.

Je vois… Et tu envisages que nous restions combien de temps ici ?

Le temps que ça se calme.

Je refuse de rester là à rien faire alors que les gamins dehors sont en danger. Keld, tu me connais bien pourtant, pourquoi m’avoir emmenée ici ?

Tu veux aller crever dehors ? Vas y, la porte est ouverte.

Tes principes commencent à m’emmerder sérieusement. Personne ne crèvera si on se rend. Range ta putain de fierté de côté, et fais quelque chose !

Faire quoi ? Revenir la queue entre les pattes ? Prouver au gouvernement qu’il a raison ? Mais merde tu comprends pas que c’est ce qu’ils attendent.

Et tu crois que tes petites guéguerres vont changer quelque chose peut être ? Non, ça ne changera rien. Il y aura de plus en plus de descente comme cette nuit, et au final on y passera tous ! Tu as un don d’orateur, les gens t’écoutent Keld. Si tu cesses de les baratiner avec tes idées à la con comme quoi on nous manipule, comme quoi nous sommes les victimes, et bien ils…

MAIS NOUS SOMMES LES VICTIMES

DES VICTIMES QUI TUENT DES GENS PAR PLAISIR ? Toi c’est ta vie, c’est ton problème. Mais ces mômes que tu as sous tes ordres, ces gamins qui mourraient pour ton nom, que tu abandonnes lâchement maintenant, c’est quoi leur avenir ? Voir cet endroit se détériorer ? Et crever en n’ayant connu qu’un espoir irréalisable de vivre un jour ?

Tu es trop jeune pour comprendre.

Toujours la même excuse. Trop jeune. Keld tu ne comprends pas que j’en ai marre ? Je suis dans la même merde que toi. Nous le sommes tous. J’ai grandi avec une mitraillette dans les mains, je connais toutes les manières de tuer à la main, je bouffe des rats crus parce que je crève de faim. J’ai dix sept ans, ceux qui m’entourent ne voient en moi qu’un morceau de viande susceptible de sauter sur une mine à n’importe quel instant. Les sentiments je ne les connais que par les livres, je ne me…

Tes livres… Comprends enfin que ce n’est pas la réalité. Ouvre les yeux un peu.

Mais j’ai les yeux ouverts. Sûrement plus que toi. Notre vie, je ne la souhaite à personne.

Tu me déçois Sis.

Apparemment je ne fais que ça.


Et je suis partie. Il ne m’a même pas retenue. Il bouillonnait de rage, se retenant de me mettre une baffe, je le sentais. J’ai erré pendant d’interminables minutes dans les sous sols poussiéreux. Les bruits de l’extérieur me parvinrent de moins en moins jusqu’à disparaître complètement. Tant mieux. Je ne voulais plus ni voir ni entendre personne. Pour la première fois depuis de longues années, je me laissais aller. Des larmes coulèrent sur mes joues si longtemps restées sèches.

Décidément c’est la journée…


Je venais de me disputer avec l’une des rares personnes auxquelles je tenais réellement. La lassitude gagna peu à peu mon corps, mon esprit, comme cela m’était tant arrivé ces temps derniers. Et si ?

Je m’assis au bord de la voie jadis si pleine de monde. Des images du passé submergèrent mon esprit, comme chaque fois que je rencontrais un parfum, une vision perdue dans les méandres de ma mêmoire. Je me revoyais, tenant la main d’une femme sans visage, au milieu d’une foule d’inconnus, luttant pour entrer dans un train. Des cris, des éclats, de la fumée. Le début de la Grande Révolte sûrement.

J’ouvris les yeux pour chasser cette vision, tout disparut comme c’était venu.
Seule la lassitude resta

Non, Sistra, non. Sois forte, continue de faire comme tu le fais depuis toujours, comme di « de rien n’était ».
Un sanglot s’échappa malgré moi de ma gorge et les larmes jaillirent de plus belle.

Ma main venait de se glisser contre ma volonté dans ma poche, et déjà, du bout des doigts j’effleurais la lame de rasoir que j’avais volée pour Keld.

La vue brouillée, je la sorti, juste pour la regarder. Je l’ai regardée, oui, se promener sur mon avant bras si pâle, cherchant un endroit où la peau se déchirerait plus facilement, où les veines étaient les plus apparentes.

D’un coup de manche, j’ai essuyé mes yeux.

Gamine pleurnicharde.

Et j’ai coupé, taillé, tranché, tant que j’ai pu. J’ai découvert la fragilité du corps humain, sa faiblesse face à lui-même.
La tache de sang opaque s’est répandue sur mes vêtements, engloutissant mes manches, décorant le sol. J’ai exprimé ma colère contre la seule personne qui le méritait : moi-même.

Et je me suis laissée tomber, seule sur le sol salle de ce quai de métro.


……Je pense que je suis morte à ce moment là….

Auteur : Keld
14/05/06 17h59 | 24 Volcan 3724

La conne. Je lui laissais 20 mètres d'avance et je la suivais... Incapable de comprendre que c'était pour protéger les autres que je voulais la cacher... Je la suivais discrètement, la regardant pleurer... Puis, elle commenca à se tailler les poignets, puis s'effondra. Un peu trop vite. Je galopais, et me retrouver à son niveau. J'examinais ses plaies. Foutu gamine, incapable de faire quoique ce soit correctement. Elle a réussit à louper ses veines. En soupirant, je la charge sur mon dos. La mettre à l'abri, la panser... Lui expliquer, ensuite.

Il n'y a personne, alors je saute du quai sur la voie. Pas de métro à cette heure, mais le rail reste électrifié. Méfiance. Au bout d'un moment, j'arrive à l'entrée de ma planque: un petit passage camouflé, qui donne sur une cave murée. Je rampe en premier, puis la hisse comme je peux. Il y a une lumière que j'allume, et un robinet d'eau chaude dans la pièce, et une deuxième petite pièce, plus une niche, en fait, pour dormir, garnie de couvertures. Il fait chaud et sec. Le luxe.

Je nettoi ses plaies, et les bandes avec un coin propre de mon tshirt. Puis, je l'allonge dans "la chambre". Pour ma part, je met mes dernieres pièces dans une boites à chaussures, avec le reste de mon magot, et je me prends un livre: "Histoire de Galactica". Pas mauvais. Au bout d'un moment, ça remue sous les couvertures, et je vois Sistra passer sa tête hors des couvertures. Je lui tends un peu de pain.

Mange.

Elle doit se sentir conne, puisqu'elle s'assied à côté de moi sans rien dire, et commence à mastiquer la bouffe infâme que je lui tend. J'hésite à lui sortir une grande tirade, puis je me retiens. Pas le moment.

J'ai aussi des livres.

Pas de réponse. Bon, essayons quand même de pas passer pour un connard...

Ta tronche est dans tous les journaux, Sis. Si je t'emmène là, c'est autant pour te protéger que protéger les autres. Désolé, j'aurais du te le dire avant.

Elle lève les yeux vers moi, pleins de larmes. Puis, elle éclate en sanglots. Pas un pleur de tristesse, ou de fatigue. De vrais sanglots déchirants, désespérés, presque le cri d'un animal blessé. Desespoir devant cette vie de merde, cette absence totale de raison de continuer. Ca me fait mal. Je connais trop bien. Je la serre de toutes mes forces, enfouissant son visage contre mon torse, autant pour la réconforter que pour qu'elle ne voit pas que, moi aussi, j'ai envie de pleurer.

Auteur : Kalyso
14/05/06 17h59 | 24 Volcan 3724

Je ne suis qu'une idiote.
Même ça je l'ai raté. Je me sens si mal, si honteuse. Et lui il est là, il me tient comme une enfant. Je veux finir, je veux qu'il me laisse partir, je veux que tout ça s'arrête.

Au fond de moi même, une chose est sûre, je recommencerai. Cet acte a été une libération pour moi, et il se reproduira tant qu'elle ne sera pas totale. En attendant, je pleure, pauvre loque. Mes vêtements sont poisseux, j'ai envie de vomir, je me dégoutte, je me hais.

Mais pourquoi t'as fait ça hein? Pourquoi tu m'as pas laissée, pourquoi tu m'as suivie?

Plus les mots sortent, et plus je me hais, plus il doit me haïr. Oui, c'est tout ce que je mérite, sa haine.
Je le frappe maintenant, mais la force n'est plus là. Mes poings s'écrasent contre son torse et je m'effondre contre lui. Je veux que ça s'arrête, tout, l'humiliation, les pleurs. Et lui, il reste calme, il me tient les poignets. Il me fait mal là où la lame s'est promenée.

Pourquoi t'as fait ça....

Toujours les mêmes mots que je répete inlassablement, dans l'attente d'une réponse que je connais, d'une attention.

Auteur : Keld
14/05/06 18h02 | 24 Volcan 3724

Calme toi.

Pourquoi tu m'a suivie?

Bonne question. Pourquoi je l'ai suivit, après tout? Pourquoi m'encombrer d'une conne qui croit pas à ce qu'on fait, qui abandonne de la plus lâche des façon? Pourquoi? Parce que j'ai besoin d'elle. Parce que trop de gens qui s'en sont remis à moi sont morts, ou pire. Parce que j'aime les regards à la dérobée qu'elle m'envoyait, croyant que je ne les voyais pas. Ca aurait peut être tout arranger que je le lui dise, mais ca veux pas sortir. Tant pis.

Et puis, elle s'est arrachée à mon étreinte, et s'est enfuie. J'ai hésité à la suivre. A quoi bon. Je suis pas là pour faire son bien contre son gré. Mais d'un autre côté, elle ira pas loin. Je repense aux "Centre de Rééducation" pour délinquants. Je le lui souhaite pas. Alors, je me lève. Putain, ma jambe me fait vraiment mal. Je boite comme je peux, et je fini vite par la retrouvée, assise en boule à pas 100 mètres de ma planque. J'hésite. Fais chier, je sais jamais comment réagir, dans ces cas là. A tout hasard, je lui prends la main.

Je t'aime bien, tu sais. Sinon, je t'aurais laissé dehors. Viens.

A quoi bon? J'en vaux pas la peine.

Ok... Crise d'infériorité. Sois je lui parle pendant 20 minutes pour la convaincre, soit j'y mets de la poigne. Sans rien ajouter, je la prend par les mains, fermement et sans douceur, et je l'emmène devant l'entrée de la planque. Mon visage a perdu toute douceur. Je m'y force un peu, c'est pour son bien. Je lui prend sa lame de rasoir.

Rentre et lave toi, t'es déguelasse.

Elle se faufile, et j'entends de l'eau couler. J'en profite pour en griller une. Quand l'eau s'arrête, j'attends une minute, et je la rejoint, non sans camoufler l'entrée. Ma jambe me fait un mal de chien. Je dois avoir le tibia fêlé. Elle est enroulée dans une couverture, pitoyable, la tête baissée.

Mange.

Je grogne, presque. La douleur a réduit ma patience à 0. Elle a du sentir que j'étais pas de bon poil, vu qu'elle se décide à grignoter un peu de pain. Je lui tourne le dos.

Va te coucher.

Regard vide... Elle m'énerve...

On en parlera demain. M'emmerde pas, et va au lit.

J'entends un froufrou de tissus. Je me retourne, elle est couchée, de dos. Je me désintéresse d'elle, mange un peu les miettes qu'elle a laissée. Pas assez de bouffe pour gacher. Je reprends ensuite ma lecture. Ma jambe me fait atrocement mal... Je finis par sentir la fatigue fermer mes paupières. J'éteinds la lumière, me déshabille, et vais me coucher. Elle est nue, aussi. Je me glisse derrière elle, l'enlace, pour profiter de sa chaleur, de sa présence. Mes mains effleurent ses petits seins, mon bas ventre ses fesses. Je suis tenté d'en profiter, elle ne résisterait même pas. Mais je me retiens. Je la serre plus fort, sentant son désespoir. Et tout désir me quitte, il ne reste que de la tristesse.

Je tiens à toi. Ne me laisse pas, Sis.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h02 | 24 Volcan 3724

Je tiens à toi. Ne me laisse pas, Sis.

Un nouveau flot de larmes, silencieuses cette fois ci. Je me sens si mal, je veux me faire si petite, si maigre, jusqu'à disparaître.
Me hait il?
Je me tourne et le fixe de mes yeux vides. Je veux lutter contre lui, mais je n'en ai plus la force. Pourquoi est ce que je suis obligée de toujours aller vers une stupide confrontation?

Pardonne moi, Keld.

Et je me sers contre lui, plongeant dans l'étreinte de ses bras solides. Lorsque je me blottis maladroitement contre lui, je l'entends gémir. Sa jambe le fait souffir. Demain nous irons chercher une bande.

Et nous nous endormons.

C'est son absence contre moi qui me réveille. Je me lève, laissant tomber la couverture.
Il est nu lui aussi, il vient de se lever et fume déjà.
Je m'approche de lui et lui masse les épaules.

Tu ne devrais pas fumer dès le matin. Ca finira par te tuer...

Il se retourne, un énervement lisible sur le visage. Il me sourit d'un air faux.

Quel enflure. Il sait que ça me met mal à l'aise et l'utilise pour ne pas entendre mes remontrances. Ce que j'ésperais pouvoir prendre pour un mauvais rêve ressurgit en moi. Je retiens mes larmes, j'ai assez pleuré pour une vie.
Le remarque t-il seulement?

Je vais faire ma toilette.

Tu ne veux pas manger?

Je n'ai pas faim.


Pour une fois c'est vrai. Tout jusqu'à la nourriture me dégoutte.
Lorsque je le rejoins, il est habillé et prêt à partir.
Je m'habille en vitesse, tirant sur mes manches de manière à dissimuler les marques.

On remonte à la surface?

Pas tout de suite. J'aimerais suivre les rails, voir où ils nous mènent. Je n'ai pas entendu le métro ce matin,et les réformes dont parlait notre dirigeant hier me font peur.

Bien chef.

Et nous partons, marchant dans les étroits passges qui nous mènent à la voie où il m'a ramassée hier. Je ne me rappelle pas avoir traversé tout cela. Je ne veux pas m'en rappeler.

Un bruit de pas rapide nous force à nous cacher. Sans réflechir nous plongeons sur les rails et nous blotissons l'un contre l'autre.

On fait quoi?

T'as entendu les ordres. Pour l'instant on repère. Cet endroit sera parfait pour enfumer ces rats.


Je le sens à présent qui tremble de colère contre moi. Je le rejoins dans sa haine mais le retiens en lui murmurant à l'oreille qu'au lieu de les tuer, il faudrait écouter leurs projets.

Et telles des ombres, nous nous glissons à la suite des soldats.

Auteur : Keld
14/05/06 18h02 | 24 Volcan 3724

"Connais ton ennemi". Je m'accroche à cette phrase, alors que nous filons les bâtards sensés nous protéger, qui sont là pour nous dérouiller. Fais chier! Tenues kaki, mitrailleuse, grenade. Inutile de rêver, on les aura pas. Alors, on les file, pour en apprendre plus. On arrive à l'entrée du tunnel, là ou le métro passe à l'air libre sur une passerelle au dessus des taudis. Un barrage. Dix amis bidasses, avec sac de sable et mitrailleuses sur trépieds. On sortira pas par là.

Sistra me regarde, d'un air de dire "alors le géni, on fait quoi?". Je comprends son ironie: j'ai insisté pour l'emmener dans le métro, mais maintenant, on est coincé. Au moins, on a appris que dans 48h, ils aller enfumer le métro, pour être sûr de l'isoler. Ensuite, ils mureront tous les accès de l'underground menant à la Zone. Pas bon.

On fait demi tour. Ma jambe se réveille, et je sue comme un phoque en arrivant à la planque. On rentre à nouveau. Heureusement, j'ai un peu de morphine, piquée dans un dispensaire. Trois cachetons, et tout me paraîtra rose. Je laisse Sistra là, et je tente une sortie. Il faut que j'en sache plus, et que je prévois un point de chute le temps que le métro soit gazé. Mais Sis peut pas venir. Pas encore, trop risqué. Elle tire la gueule, mais reste. Je lui souris. C'est con, mais le danger, ca rapproche.

Je connais un passage à travers les égouts, qui mène à un vieux parking sousterrain pas surveillé. On part d'une station de métro abandonnée, un collecteur d'égout, le parking, et hop, en plein dans la zone. En gardant les pieds au sec. Ce passage là est pas gardé, donc ça va.

Dans la zone, changement d'ambiance. Patrouilles, tank, check point, hélico en l'air. Super. Je ricanne bêtement. Merci Morphine. Je rentre dans un bar. A l'holo TV, ça parle de la directive 65: plein pouvoir au gouvernement, déploiement de l'armée, confinement total de la zone, ouverture de camps. Je frissonne. C'est quoi ce bordel.

Je traine toute la journée, à la recherche d'info, mais aussi de bricoles. Je tabasse un blaireau, et lui pique son fric. Moche. La fin justifie les moyens, non? Je vais ensuite chez un receleur. J'achète un petit pendentif. Pas très beau, mais ça lui fera peu être plaisir. Je veux pas qu'elle recommence ses conneries. J'achète aussi de quoi manger.

A la nuit tombée, je refait le trajet retour. Ma jambe me refait mal à en crever, et je regobe trois comprimés. Idéal pour se décoller le crâne, mais c'est ça ou couiner comme une pucelle effarouchée.

Quand j'arrive à la planque, je suis complètement stone. Sistra est là, endormie. Nue. Je la regarde un moment, puis me glisse contre elle. Morphine, désespoir ou simplement hormones, j'ai envie d'elle. Fort. Je serre les dents, essayant de ne pas perdre le contrôle. J'ai chaud.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h03 | 24 Volcan 3724

Il m’a plantée toute la journée dans un égout puant, on ne peut pas dire que ce soit le genre de chose qui m’envoie en l’air. Alors je m’en suis occupée. Je suis retournée à la planque, faisant un petit détour par la ville pour chercher à bouffer. J’ai rencontré Jent, un petit dealer. Faut croire qu’il était dans un bon jour : montrer mes seins m’a suffit pour obtenir assez pour faire décoller deux personnes. Et je suis redescendue, petite souris, vers notre trou à rats. Sur les murs j’ai croisé mon visage. Génial, maintenant c’est celui des anarchistes. De quoi se faire des ennemis. Il faudra éviter les vendus et les sorties dans Lievanta pendant un moment.

Dans la chambre, je me suis assise sur le sol et déshabillée : les tablettes de Jent réchaufferaient un mort. J’en sors une et la fait rouler entre mes doigts. Je la sens d’abord, remerciant je ne sais qui de ne jamais avoir été curieuse de savoir quelle merde les compose. Puis je la prend dans ma bouche, et joue avec ma langue. C’est sucré. Un rat passe et me pique un morceau de pain. Moi je ris, euphorique, ridicule. Deux autres tablettes, et je suis partie. Combien de temps, je ne sais pas. Je saigne du nez. C’est ça qui me ramène à la réalité. Sur mon avant bras, une plaie s’est rouverte. Je tire sur la bande et m’amuse du sang qui coule. Efficace la daube de Jent. Il faudra le remercier. L’euphorie engendre une envie de sexe. Je ne vois aucun objet suffisant à me satisfaire. Alors je hausse les épaules et reprend une pilule magique. J’ai envie de pisser. Un peu faim aussi. Je tournoie dans la pièce jusqu’aux toilettes de fortune, puis je décide de me laver. L’eau c’est mon élément. Lorsque je sors enfin, je me sens bien.

Encore trois cachets – les derniers sont pour Keld. Et au lit. Je m’allonge, nue et trempée, dans les draps crasseux et m’enroule dedans. Enfin je l’entends rentrer. Il ne voit pas les pilules et s’allonge directement près de moi. Il sent la fumée. La légèreté de ses mouvements m’indique qu’il n’a pas pris que du tabac.

Vicieuse, animale, je me tourne vers lui et lui monte dessus.
Ses mains se posent sur ma poitrine alors que je descends mon visage jusqu’à sentir son souffle chaud contre ma nuque. Ses mains descendent le long de mon dos, jusqu’à mes reins, tandis que ma langue se promène sur son torse. Je lui souris, et lui glisse à l’oreille.

Baise moi comme jamais tu n’as baisé personne.

Souriant de mon audace, je le fais pénétrer en moi.

Auteur : Keld
14/05/06 18h03 | 24 Volcan 3724

*ATTENTION, C'EST CRU. TRES. Z'ETES PREVENUS*


Elle est stone, moi aussi. Quelle meilleure façon de baiser? Demain, on pourra se regarder en face, prétextant la came pour excuser nos excès. Le faire sans le faire, quoi. Je suis encore entrain de me dire ca quand elle m'accueille. Enfin, me happe, vu les circonstances. Elle est chaude, humide, totalement déjantée. Ca me va. Pas de tendresse se soir.

Je me retourne brutalement, la plaque sous moi, ses poignets dans mes mains. Elle se débat pas, se contentant d'étendre plus ses jambes, je va et viens à toute vitesse, mais ça lui suffit pas. A lors que je me retire pour reprendre mon souffle, elle me prend dans sa bouche, et fais des trucs avec qui sous entendent qu'elle à déjà du tapiner. Je la repousse, elle ricane. Je la plaque au sol, à plat ventre, et la prend par là où elle devrait arrêter de rire.

Elle me dit qu'elle a mal, mais qu'elle s'en fou. J'accélère. Elle cri, mais me demande de continuer. Je me retire, et salit son visage. Ca la fait rire. Elle me laisse cinq minutes pour souffler, et on recommence. Ca dure longtemps, on se chevauche a tour de rôle, et on gémit comme deuux perdus. Puis, c'est la descente. Je sors dégueler, j'ai mal à la jambe. Sistra tremble comme une feuille, et se griffe les bras. Elle est sacrément pâle. Puis, elle vomit aussi. Je la voit tendre la main vers des pillules, en gober une. Son visage reprend des couleurs, et elle s'endord.

Moi, je continue tout seul mon bad trip. Je vomit encore une fois, et remarque que mes mains tremblent. J'ai envie d'un autre cachet, mais je me retiens. La morphine, on s'y accoutume vite. J'ai froid, je suis dégoûté de ce qu'on a fait, j'ai peur de cette directive à la con, tout va mal. Je pleure un peu. Puis, je me reprends... Au moins, on est détendus, maintenant. Je vomit une dernière fois, et vais rejoindre Sistra. Si elle me parle de ça demain, je dirais que je me souviens pas...

Je me colle à elle, pour essayer de me réchauffer. Elle murmure quelque chose comme "Xzfsss" dans son sommeil. Je me marre, et la serre plus fort.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h04 | 24 Volcan 3724

Le pire après ce genre de nuits, c’est le réveil. Avant d’ouvrir les yeux, je ressens le tournis qui va m’atteindre. Je reste étendue près de lui quelques secondes et me décide enfin d’affronter la matinée. Aller pisser, me laver, me brosser les dents. Ok ça a l’air plus dur que prévu, je n’arrive pas à aligner deux pas. La main sur le bas ventre, je ris jaune. Espérons qu’il n’ait pas éjaculé en moi. Je crache sur le sol près de l’entrée pour faire partir le goût dans ma bouche et lui pique une clope. Je touche pas ces saloperies d’habitude, mais là il me faut quelque chose qui me préparera à affronter son regard. C’est vrai que ça calme. Je rentre, me lave et vais préparer à manger. Le rat a fait de notre festin le sien. Il reste du pain sec. On a connu pire. Je lui laisse ma part et vais le secouer. La douleur est toujours là. Il n’y est pas allé de main morte…

Hey Keld. Faut qu’on se lève. T’as à manger sur la table. Prépare toi, moi je vais voir ce que ça donne à la sortie.


Une demi heure plus tard nous sommes prêts. Nous marchons en silence, contrairement à notre habitude. C’est en arrivant près de notre territoire qu’il brise ce silence.

Oh merde. Pitié pas eux…


Je suis son regard et comprends vite. Eux c’est les Slembs. Un autre gang de notre genre installé plus loin dans la zone, au-delà des décharges. Officiellement ennemis, nous nous allions contre le « gros méchant ». Aujourd’hui, ils ont pas l’air d’être là pour une alliance…

Tu crois qu’il y a du nouveau côté réformes ?

J’en sais rien.


Et il s’élance, moi sur ses talons. J’ai du mal à le suivre malgré sa jambe blessée. Je me sens lourde et j’ai envie de vomir.
Lorsque nous arrivons, la scène qui nous attend ne nous réjouit guère.
Les fenêtres sont brisées, des éclats de verre jonchent le sol. Des affiches de propagande sont collées partout.
Au centre de la pièce, Blentio, le chef des Slembs tient Bratt par les cheveux. Il hurle.

KELD. SORS DE TON TROU.

Derrière lui, deux hommes en uniforme ricanent. Il nous faut peu de temps pour comprendre.
Coupez la tête est la manière la plus sûre de tuer quelqu’un. Keld est notre tête. L’épée qui servira à l’arracher sera notre. Les Slembs, ces enfoirés, sont des vendus. Nous détruire leur apportera trois morceaux de viande, peut être du riz aussi. Rien aux yeux de l’état. Assez pour nous faire tuer un homme.

Blentio se lance dans un discours où Keld est un traître, un lâche et un mauvais chef. Les autres boivent ses paroles. Ceux qui protestent se prennent des taloches et crachent du sang.
Il n’est pas chef pour rien. Comme Keld, c’est un orateur de génie.
Lorsque j’arrive, la joute commence. Ce combat verbal assurera une armée au meilleur des parleurs.

Putain Keld arrête toi et pars. Tu comprends pas que c’est un piège à cons ?

Je murmure entre mes dents et serre mon arme entre mes doigts.
Tout ça va mal tourner, je le sens.

Auteur : Keld
14/05/06 18h05 | 24 Volcan 3724

Ok... J'ai baisé une amie, j'ai une jambe en morceau, je suis en pleine descente de mauvaise morphine, j'ai rien dans le ventre, un connard vendu au flics me traite de blaireau et va dessouder un gamin. Bonne journée en perspective. Je m'avance, laissant Sistra et ses avertissements derrières. Si les flics la voient...

Je lâche quelques paroles creuses, rhétorique de comptoir et langue de bois, histoire de me donner le temps d'y voir clair. Primo, sauver Bratt. Si possible. Ensuite, sauver mes fesses. En piorité, en fait. Je m'en fou de garder la face, surtout ce matin.

Allez, Blentio, tu nous présentes tes nouveaux copains? Ils ont l'air cool, Dupond et Dupont.

Ca fait pas rire les deux pinots, qui commencent à s'agiter derrière Blendio. Ca le rend nerveux. Bien.

Keld, sale pute! On t'a pas beaucoup vu, hier... Partit te planquer, lopette?

Je souris... Ce mec est un bouffon, ca va être drôle...

Ouais, je me planquais. Je suis pas allez pleurer au poulailler... Chacun sa définition du courage...

Il s'énerve, et menace Bratt un peu plus... Mon plan se précise... d'abord, tourner l'auditoire contre lui et les flics. Ensuite, dégainer mon derringer, et lui coller deux balles de 38 dans les dents avant qu'il comprenne. Ca devrait sauver Bratt, et les flics feront rien avec 30 gosses énervés entre eux et moi. Ensuite, courir.

Tu fais le malin, mais c'est pas toi qui est menacé, contrairement à Bratt, pédale.

Blentio... C'est pas moi non plus qui prend en otage un môme de 12 ans pour essayer de faire croire que j'ai des couilles. Et c'est pas moi qui me vends aux putes dès que trois treillis envahissent la zone.


Les autres se marrent, les flics portent la main à leur flingues, Blendio sort un hachoir. C'est serré, mais j'ais pas le choix. Je sors le derringer de ma poche, et presse la détente. Deux balles dans le bas du visage. Le hachoir retombe, Blentio aussi, en gargouillant pitoyablement. Bratt s'esquive, les flics me braquent. Les autres sont interdis.

Mon gang est dissous. Je me casse, mais je plomberai tous les lâches qui se vendent à des flics, surtout s'ils l'obligent à tuer un gosse. C'est ça que vous voulez? Plombez Bratt pour faire plaisir à ceux qui ont flinguer vos potes avant hier devant le Parlement?

Les flics m'ont laissé finir ma tirade. Connerie. Les gosses font écran entre eux et moi. La vieille solidarité reprend le dessus.
Je peux lire les pensées qui se frayent un chemin sous la caboche des flics... Deux flingues, deux fois six balles, vingt gangers. Sans cesser de nous braquer, ils reculent lentement, puis se barrent.

Les autres se tournent vers moi comme vers un nouveau messi. Mais c'est fini.

Barrez vous! Il n'y a plus de gang. Sauvez vos peaux, mais ne faites pas confiance aux flics, ni à ceux qui les suivent. Bonne chance à vous!

Je me casse, ils me saluent, pas rancuniers. Je retrouve Sistra, et me laisse enfin allez à mes tremblements. C'est pas passé loin. On s'éloigne, elle et moi... Je la regarde en repensant à cette nuit. C'était bon, mais trop sale. Mais j'espère quand même qu'on le refera sous acide. Mais aussi sans, pour voir. Je garde mes réflexions pour moi, et lui jette le pendentif.

Cadeau!

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h05 | 24 Volcan 3724

L'adrénaline, quel truc génial. On avance, de plus en plus vite, puis on se met à courir. Il me lance un collier, un de ces trucs à 2 sous. Je le regarde en souriant et le met autour de mon cou. Je me sens bien, j'ai l'impression qu'il me réchauffe.

Ce sera mon talisman.

Quelle conne. Je crois que j'ai jamais rien dit d'aussi débile. Avec un peu de chance, il aura pas entendu. On continue de courir, sans sentir la peine, la douleur. Lorsqu'enfin on s'arrête, on a dépassé notre territoire, celui des Sembs, Lievanta la grande n'est plus qu'un petit amas de tours de cristal qu'il nous semble aussi simple à écraser qu'un chateau de sable.

Hey mais on est....

Exact. C'est là que je t'ai amenée quand je t'ai sortie de la bas.


"La bas". C'est toujours ainsi qu'il l'appelle, cet endroit qui pour lui est synonime d'enfer.

Pourquoi est ce qu'on est pas allés directement à la ville, comme tu le fais avec les autres gosses?

Je sais pas. tu étais une des premières, et il y avait quelque chose en toi peut être.
Tu étais pas comme les autres, tu n'as pas pleuré, pas eu peur. Tu as juste suivi, docilement, sans poser de questions. Il m'a semblé que tu contenais en toi assez de colère contre cette ville pour la détruire d'une parole.


Je souris en l'entendant parler de moi ainsi. C'est rare qu'il fasse des compliments, et même si ce n'est pas censé en être un, je le prends ainsi.

T'es encore sous acide?

Il mime de me donner un coup sur la tête en riant. Je crois que je ne l'ai jamais vu comme ça. Libéré.

Bon on fait quoi maintenant mon capitaine?

Une ombre passe sur son visage et il s'éloigne de moi.

Je voudrais qu'on aille faire un tour du côté des beaux quartiers...

Euh... Je veux pas faire ma chieuse, mais, on a bien fait 20 bornes aujourd'hui. Avec ta jambe et mon... enfin, on en a pour des heures....

Qu'importe. On se repose cette nuit dans les rocheuses - si jamais on nous a poursuivis, là bas personne ne nous trouvera. Et demain on part de bonne heure. On dort chez Blemp. Je veux en savoir plus sur cette histoire de gazage.

Ok...


Et nous nous installons tous les deux tant bien que mal à flanc de montagnes, entre deux états. Desertica nous offre ses secrets nocturnes. Je crois que c'est laplus merveilleuse des nuits que j'ai passée avant que tout bascule.

Auteur : Keld
14/05/06 18h05 | 24 Volcan 3724

J'aime pas les souvenirs. La plupart des miens sont sales et puent la pisse. Mais celui de la première nuit de Sistra dehors, pas loin de là ou on est maintenant, celui-là, je l'aime bien. Elle devait avoir 14 ans, et ressemblait à une cocotte minute sous pression. Je souris et me reprends; voilà que je vire niais, maintenant. Je farfouille dans mes poches, et ma main se referme sur mon paquet d'allumettes. Je pars vadrouiller autour de l'infractuositée dans les rochers qui nous abritent, et je ramasse quelques arbustes secs du désert. J'en fais un tas, et, allume un feu.

Un vrai boy scout, Keld!

Elle se marre, moi aussi. J'ouvre mon sac, elle fait ses poches. Une tranche de jambon reconstitué, deux bouts pains, quelques clopes, de la morphine et des acides, un sachet de marschmallow, une bière et de l'eau. De quoi passer une bonne soirée. Je me rapproche d'elle, la serre dans mes bras. Pour une fois, elle pleure pas, ni ne se dérobe. On reste là, tranquilles, à regarder le feu, le scintillement des étoiles et de la ville, à écouter le désert et ses mille bruits feutrés. La nuit est chaude, mais une petite brise la rend agréable. On se sépare, à regret. Je fais griller le pain, elle les marshmallow. On mange, sans rien dire. Pas un silence tendu ou nerveux, juste celui de deux personnes qui se connaissent bien et qui n'ont pas besoin de parler pour être à l'aise. Elle revient ensuite dans mes bras, et on se partage la bière. J'allume une clope, lui en tends une, qu'elle accepte.

Je me laisse aller à mes pensées. Et si c'était ça, l'avenir? Plus de luttes, plus de combats. Juste elle, moi, un boulot à la con, mais des escapades dans les rocheuses. Ca serait peu être pas le bonheur, mais ce qui s'en rapprocherait le plus. Le calme enchaînement des jours. Je la verrais vieillir, elle me ferait des enfants. Je la serre plus fort. Elle accepterait si je le lui demandais maintenant. Mais des images de la Grande Révolte me reviennent. Abandonner? Se rendre? Le choix est simple: Liberté ou bonheur. Je me crispe.

Je me sépare d'elle, jette ma clope dans le feu, et m'éloigne. Je sais pas si elle a suivis le fil de mes pensées, mais elle me connait. Elle me laisse me mettre à l'écart. J'escalade un gros rocher, et me tourne vers la ville. Même ses plus hautes tours sont à mes pieds. Je la regarde fixement, jusqu'à m'en faire pleurer les yeux. Elle ne m'a pas laissé le choix. Je me battrais, toujours. Je la hais de dicter mes décisions. Il n'y aura pas de paix, pas de trêve, pas de jours doux et heureux, juste le sang et le feu, jusqu'à la mort. J'ai envie de hurler ma haine, mon désespoir, mais à quoi bon? Ma décision est prise, depuis bien des années. Je retourne calmement auprès du feu, Sistra m'attends. Elle me souris, pensant qu'un autre dilemne plus charnel me tiraillait. Ce n'est pas plus mal.

La lutte, encore, et à jamais. Mais elle n'a pas besoin de le savoir ce soir. Cette nuit, c'est la trêve, le rêve silencieux et non exprimé de jours meilleurs qui ne viendront pas. Je me rassieds à côté d'elle, et gobe un acide. Elle suit mes pensées, cette fois, et en gobe un aussi. J'étends mon manteau sur le sol, et l'entraîne dans mes bras. On s'embrasse. Je la déshabille doucement, et jette ses pauvres fringues au sol. Matelas de fortune pour un abandon désespéré. Le vent frais de la nuit lui donne la chair de poule. Je la serre plus fort, et ressents la première montée...

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h07 | 24 Volcan 3724

Nous avons fait l'amour toute la nuit. Maintenant c'est l'aube. Il dort dans mes bras. Moi je regarde le ciel sombre. Aux premières lueures, je me dégage doucement de lui et marche jusqu'à un rocher. M'appuyant sur un rocher haut, je regarde la silhouette de la ville se découper au loin. Une douleur dans mon bras, je le regarde. Mes marques. Ca me fait monter les larmes aux yeux et sourire en même temps. Je secoue la tête et me perds dans mes pensées. C'est sa main sur mon épaule qui m'en fait sortir.

Il faut partir.

Il a retrouvé son ton posé.

Ta jambe? ça va?

Je survivrai. Prépares toi.


Il me lance mes affaires et va se soulager derriere la montagne. Pudique? A croire qu'il deviendrait humain. Je me sens mal, triste. J'aimerai lui parler, de tout, de rien, de moi. Mais je pense que c'est égoïste. Alors je me tais. Et j'obéis.

Nous partons finalement. Ca nous prend la journée. Il a mal à la jambe, je me sens nauséause. Le soleil tape fort. C'est presque un soulagement pour nous d'arriver près de notre "village". Nous sommes obligés de le traverser si nous voulons faire vite. Là nous découvrons des rues vides, mortes. Les murs sont tagués des symbole du clan ennemi. La police est partout, installée dans nos maisons, dans nos bars. Ils rient, comme si détruire le seul havre d'un petit groupe de misérables enfants leur apportait une plenitude totale. J'ai envie de gerber.

SIIIIIIIS

Bratt! Le petit court vers moi, le visage en sang. Il me sert dans ses bras, enfouissant sa tête contre mon ventre. Il pleure. Il souffre.

De retour les rats?

Leiel, le frangin de Blentio.
Je hurle.

CONNARD! Qu'est ce que tu lui as fait??

Oh la souris s'énerve. Qu'est ce que je lui ai fait? J'en ai fait ma courtisane.
Hep petit, il t'en reste un peu. Là.


J'essaye de retenir Bratt, mais il est agile. Il s'échappe et court. De ses petits bras il frappe Leiel, le géant, de toutes ses forces.
Et il se prend une balle. En plein dans la tête. Des morceaux de cervelles, d'os s'envolent.
Le temps semble ralentir, puis s'arrêter. Je sens Keld se crisper à mes côtés. Il va bondir. Mais je suis la première. Je prends mon élan, et je cours. Je ne sais pas où je trouve cette force. Je saute sur Leiel, et le brise de mes mains. Sous la surprise, il n'a pas le temps de dégainer. Ses "soldats" n'ont même pas un regard pour lui. C'est la loi de la jungle. Ses os, ses dents craquent. Je m'assieds sur son torse et le frappe jusqu'à ce que Keld me prenne par les épaules et m'arrache à la bouillie qui reste de son crane.

Il est mort, Sis.

JE VAIS TOUS LES TUER!


Il me serre contre lui, et me calme. Je tremble, mais me laisse faire. Finalement je me dégage de ses bras et pars en direction des murs de Lievanta. Sans un regard pour la petite dépouille de Bratt. Je ne veux pas pleurer.

Blemp nous accueille à bras ouverts, comme à son habitude. Il nous offre une chambre.
En me douchant, je l'entends parler au téléphone. Il me semble entendre nos noms.
surement une hallucination.

Je rejoinds Keld dans la chambre et m'allonge dans mon lit. Il me dit que demain nous devrons entrer chez les riches, et découvrir leurs projets. Je feins le sommeil.
Je pense à Bratt. Mon petit Bratt. Pour lui je les tuerai tous.

Auteur : Keld
14/05/06 18h07 | 24 Volcan 3724

Elle est mal. Compréhensible. La trêve est bien finie. Je me relève, et vais m'allonger dans son lit, contre elle. Je l'enlace. Il n'y a rien à dire. Alors on se tait. Elle est crispée, mais elle finit par s'endormir.

Quelque chose me réveille. Quoi? L'instinct, un changement subtil dans l'atmosphère du quartier. Je regarde l'horloge sur le mur. 4:02. L'heure de la police secrète, de la trahison. En bas, un bruit de porte mal huilée qu'on essaye d'ouvrir en silence. Sur le mur d'en face, les ombres déformées d'uniformes. Pas besoin de me faire un dessin. On est vendus.

Je la secoue, la main plaquée sur sa bouche. Elle panique, puis me reconnait, et se calme. Je lui murmure.

Les flics, en bas. Je vais faire diversion. Essaye de te barrer.

Elle essaye de protester, mais je lui cloue le bec.

Je compte sur toi pour me tirer de là où je vais me retrouver.

Je ramasse mon pauvre derringer, mon couteau, tout en réfléchissant à ce que je vais faire: il faut que je sois assez dangereux pour que ceux qui cernent la maisons soit obligés de venir en renfort, dégageant la route pour Sistra. Mais je dois pas les amocher trop, sinon, ils me flingueront, et je tiens un peu à ma vie. Elle est prête.

Attends que ça barde, et faufile toi dehors. A bientôt, Sis.

J'empoigne le pistolet, et descend doucement les escaliers. Blemp est en bas, en train de négocier notre prix. Ca me surprendrait pas que ca fasse 30 deniers. Ca sera pour lui. Détonation. Il mange les deux balles au sommet de la tête, ce qui envoit valdinguer sa calotte cranienne derrière la gazinière. Il gueule comme un fou, ce qui laisse les flics interdits. Ils ne comprennent pas tout de suite. Ca me donne quelques secondes, que je mets à profit pour recharger.

Il est là!

Ce flic aurait mieux fait de pas attirer mon attention. Les deux suivantes sont pour lui. Je vise les jambes. Il s'effondre en beuglant. Les autres sortent leurs armes, et ca commence à défourailler. Je me planque derrière l'encadrement de porte, et pousse un cri, tout en rechargeant. Avec un peu de chance, ils vont penser m'avoir eut. Ca ne loupe pas. Un poulet s'avance, j'entends le pas de ses rangers sur le lyno. Quand il arrive à ma portée, je lui plante mon couteau dans la cuisse, et passe mon bras autour de son cou, lui braquant mon arme sur le visage.

Tirez pas, les gars!

Il fait pas le fier, et à vrai dire moi non plus. Les autres nous braquent, mais ne bougent pas. J'entends des pas dans la rue, les autres arrivent. Je prie je ne sais qui que Sistra file maintenant. Dans ma tête, je commence à compter le nombre de pas qu'elle a le temps de faire.

Lâche le, petit, on te veut pas de mal!

Approchez pas ou je dessoude votre pote!

Petit, aggrave pas ton cas!


Le sergent qui me parle a l'air sympa. Je sens que ça ne lui plait pas, ces trahisons, ces arrestations nocturnes. J'essaye d'en profiter pour donner à Sistra quelques mètres de plus. Je vais me la jouer camé en manque.

Putain! Je vais le plomber cet enculé! J'ai rien à perdre! Barrez vous tous, ou je le plombe! Putain de merde! Dégagez!

Ils ne bougent pas. Le sergent reprend.

Petit, pause ton flingue et relâche le. T'es foutu, mais sauve au moins ta vie!

Sistra a au moins 100 mètres, maintenant. Si j'insiste, ils vont me flinguer. Tant pis. Je baisse lentement mon flingue, le laisse glisser au sol, et lève mes mains. Tout le monde, même moi, pousse un soupir. Ca aurait vraiment pu partir en vrille.

Je me laisse menotter, et emmener dans un fourgon. J'ai un sourire en entendant les flics comprendre que mon petit manège à servit à couvrir la fuite de Sistra. Le sergent monte à l'arrière, avec moi, et on démarre.

T'as des couilles, petit. Tu m'emmerde, mais je respecte ça.

On se sourit.

Vous m'emmenez où?

Il détourne le regard.

C'est pas moi qui décide petit. Désolé.

Je dégluttit, et on se tait. Que dire de plus? Le fourgon roule un moment, puis s'arrête. La portière s'ouvre.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h07 | 24 Volcan 3724

Les enflures....

Le seul endroit que j'ai trouvé est un renfoncement dans le toit. Je m'y suis blottie, attendant que ça se calme en bas. Ils ont embarqué Keld. Et blemp est un enfoiré de première. Je commence à croire sincèrement que nous sommes manipulés. mais mains me démangent d'aller casser la gueule de notre pseudo bienfaiteur, mais je ne pourrai pas suivre la fourgonnette si je vais le faire. Qu'importe. Je le retrouverai et referai les murs avec son sang.

Agile, je saute à bas de mon perchoir et court après la voiture. Heureusement pour moi, elle ne roule pas très vite.
Elle me conduit jusqu'à une haute bâtisse aux murs lisses et aux fenêtres rares. Une prison. Au fur et à mesure de mon avancée, comme cette nuit là dans le métro, des images me reviennent. Et cette putain de douleur dans le bas de mon ventre.

J'attends un peu. Une autre voiture arrive. Dedans je reconnais Jo, une gamine de l'ancienne banlieue que nous habitons. Le manque de bouffe a du se faire ressentir. Elle s'est fait prendre pour fauche surement. A moins qu'ils aient décidé de faire notre quartier. Je souris en pensant à cette possibilité. Ce serait un trop gros risque.

Discrètement, je me glisse entre les roues de la camionnette et reste agripée aux divers tuyaux, me brulant les mains, le ventre et le visage. J'en sors lorsque je n'entends plus un bruit.
Me voilà donc au coeur de la forteresse de l'ennemi. Je fais quoi? Je doute qu'il y a it des cartes aux murs. Alors je suis mon instinct, je me fis aux bruits. Comme quand on chasse. Sauf que là, j'ai l'impression que c'est moi la proie.

Il y a des traces partout. Boue, sang, eau... Les murs sont couverts de traces de mains, des doigts qui ont tentés, au cours de ces derniers années, s'accrocher à une liberté qu'ils savaient impossible. Je suis sure que si je regarde sur le sol, je verrai des ongles brisés par l'effort.

Un bruit de pas et une voix qui intime l'ordre d'avancer. Je décide de me diriger par là bas. Il ne peut pas y avoir tant d'interrogatoire que ça à cette heure du jour...
Bingo. Je retrouve mon Keld, quelque peu amoché, mais toujours en vie, entouré par deux flics. On dirait qu'ils lui ont mis une athèle. J'ai passé tant de temps que ça à attendre dehors??
Un coup d'oeil à la montre d'un des pantins m'indique qu'il est bientôt 6 heures. Cela est confirmé par les six coups que j'entends. Ces six coups qui, deux jours auparavant guidaient notre émeute. Ils semblent proches. Serions nous dans le bâtiment dominant de la ville dont les bruits résonnent jusqu'à nos portes? Je trouve ça malsain, faire d'une prison le centre d'un monde...

Profitant d'un moment d'innatention de la part des geôliers, je me glisse entre la porte et le mur. Quelle conne. La salle est vide, les murs sont nus. Il n'y a qu'une table et deux chaises qui se font face. Très vite, je cours vers cette table. Les bruits de pas m'indiquent qu'ils se rapprochent. Je fais quoi? Me faire passer pour une secrétaire? Je regarde ma tenue et l'état de mes membres - noirs de crasse - et comprend que ce sera incrédible. Les voix se rapprochent. Je plonge sous la table, tends les jambes, les bras, et m'appuie contre les quatre pieds. Que ça se passe vite....

C'était moins une. Ils rentrent et s'installent. Sous ma poitrine, je reconnais les jambes de mon ami. Un seul homme s'installe face à lui. Près de la porte, je vois les jambes d'un autre en uniforme. Dans mes bras je ressens la douleur qui s'installe.

Et c'est parti...

Auteur : Keld
14/05/06 18h09 | 24 Volcan 3724

Ils ont été curieusement cool. Quelques gnons, plus pour la forme qu'autre chose, et ils m'ont même mis une atelle. Sympa. Ils m'ont ensuite emmener dans une salle d'interrogatoire. Ils veulent que je leur raconte quoi, au juste?

Là, on se met à patienter. Ca dure un moment, puis j'entends un bruit de pas dans le couloir. Un mec rentre. Plutôt jeune, dans le milieu de la vingtaine, bien foutu. Long imperméable noir, casquette à cocardes, bottes en cuirs. Les deux flics se chient littéralement dessus, se redressent, et lui donne du "Monsieur le Directeur".

Laissez nous.

Les deux flics s'en vont, inquiets, effrayés. Je me dis que j'ais du vraiment foirer quelque part. Ce mec a pas l'air d'être un guignol.

Oh, et dites à votre amie... Sistra, c'est ça, de sortir de sous la table.

Eberluée, je vois Sis sortir de sa cachette. Merde, ce mec est fort. Elle s'assied à côté de moi, et on attends ce qu'il a à dire.

Bien, avant toutes choses, je comprends ce que vous ressentez. J'étais dans la grande révolte.

Là, j'hallucine.

Avec ta tronche de rupin de merde?

Il se marre un grand coup, et pose un papier sur la table. Un vieux papier. Il y a sa photo, plus jeune, et "pupille de l'etat", écrit dessus. Gaffe.

Nous avons pris des voies différentes.

Il baisse le ton.

Je représente un groupement d'intérêt qui veux changer le système. Ici, je peux vous parlez sans caméra, sans témoins. Je vais faire vite. Je suis vos actions depuis quelques temps, Keld. Impressionant, je dois dire. Je peux vous proposer un marché, à tous les deux. Ca ne sera pas forcément... Plaisant. Mais ça peut marcher.

Ah ouais? C'est quoi ce marché à la con? Ou est l'entube?


Il ne perd pas patience, et je me sens con. Sistra me fait signe de me calmer. Elle a raison, on a rien à perdre.

Bon, je ne veux pas perdre mon temps, ni vous faire perdre le votre. Sistra, une soirée de "la haute" se prépare. Une soirée... chaude. Ils veulent une putain de la zone. C'est moche, mais vous approcherez des puissants, et pourrez glaner argent et informations. Vous devrez simplement les partager avec moi. Je vous emmène chez l'organisatrice, une puissante industrielle, elle vous expliquera tout.

Keld, j'ai le pouvoir de nommer des adjoints exceptionnels. Je vous prend à mon service. Je vous placerez chez cette même femme, comme larbin, mais un peu plus tard, pour ne pas éveiller ses soupçons. Là encore, vous partagerez les infos avec moi.

Mes garanties: vous sortez immédiatement, libres, d'ici. C'est à prendre ou à laisser. Je vous laisse un quart d'heure pour y penser.


Le mec est ressortit. Sistra est moi, on s'est regarder, on a tourner la tête, et regarder la prison par la fenêtre: impossible de fuir, maintenant. Et puis, franchement, c'est une chance inouïe. Et on sera toujours à temps de se barrer une fois dehors. Il est revenus, on a accepté. J'ai peur pour Sistra. Mais je sais qu'elle a déjà tapiné, et elle me dit que ce sera ok. Elle m'embrasse. On se sourit.

Le directeur est revenu, et nous a emenez à sa voiture, le genre avec chauffeur.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h09 | 24 Volcan 3724

Pute. C'est le seul statut que j'atteindrai jamais ici. Ca me fait mal quelque part au fond de moi même, mais j'envoie chier ma conscience et j'entre dans la voiture à la suite de Keld. Ce type, ce président. Il m'inspire pas trop. Il est "trop bien". Les gens ici nous détestent, pourquoi nous aider? Un flic en plus. Certes haut placé, mais un flic quand même. Mais Keld le croit. Je crois Keld.

Avec un frisson, j'imagine déjà ce que je vais devoir subir ce soir. Ces regards envieux, l'excitation de toucher enfin une de ces petites salopes de la zone, se dire qu'on a entre les mains le corps d'une "anarchiste". Et le pire, c'est qu'il penseront que je prends mon pied de sentir leur bites en or au fond de moi, que je leur serai reconnaissante de m'offrir l'opportunité de cotoyer le beau monde. Il n'y a pas à se leurer, pour eux je ne suis qu'une pauvre gosse issue des égouts de cette ville qui ne souhaitent qu'y revenir, un animal trop heureux de toucher leur sol. C'est ce que leur montre les médias. C'est ce qu'ils veulent voir.

Je me contorsionne pour regarder autour de moi. Keld me dit de me calmer. La voiture s'arrête, on doit être arrivés. Keld et moi sommes séparés. On me lance des regards dégouttés lorsque je marche de mes pieds impis sur le sol doré de leur palais. Quand j'arrive, on me jette presque dans la salle de bain.

Tu as besoin d'aide?

Je ne sais pas, je dois faire quoi? Ca se mange ça?


Ma plaisanterie ne les fait pas rire. Je n'ai jamais vu autant de savons de ma vie. Il doit y avoir de quoi construire une seconde Lievanta ici... Je m'amuse un peu, gamine. Lorsque je sors, on me retire ma serviette, me laissant nue au milieu d'une salle bleue. Je m'inquiète pour Keld, je m'inquiète pour moi. Je repense à Bratt.
Une femme entre. Cette femme. Si le diable avait un visage, ce serait le sien. Elle incarne à la fois la perfection, et l’horreur. Elle me lance un morceau de tissu.

Habille toi.

C'est un bonnet?

Très drole. C'est ça ou tu restes nue. A ta place je me dépécherai.


Impétieuse. Je m'éxécute, enfilant cette tenue ridicule qui dévoile plus ma peau que le moindre de mes sous vêtements.
Elle me toise de haut en bas, l'air de dire "c'est laid, mais s'il y a que ça, on fera avec"

Elle hésite à me prendre la main. Finalement elle m'impose de la suivre et m'entraîne par des couloirs plus somptueux les uns que les autres jusqu'à une pièce richement décorée où elle m'assied sur un lit.

Bon, Sistra c'est ça? Est ce que tu me comprends bien quand je parle?


Bien sur que je te comprends pauvre conne…. Je suis pas un clébard.
Je murmure un oui. Sa gorge est proche de mon visage. Il s’en dégage un parfum divin. Une délicatesse et une féminité parfaites. Je pourrais arracher cette peau si fine d’un coup de dents.
Mais j’ai peur pour Keld. Et j’ai raison.

Voila qui est parfait. Bien. Alors écoute moi bien. Tu ne le sais sûrement pas, mais tu es dans un a-pp-a-rte-ment.

Pas la peine de me parler comme à une bête. Je sais pas si c'est pareil chez vous, mais quinze ans passés, on s'exprime comme des humains.

Cynique hein?


Elle croit m'impressionner avec ses grands mots à la con? Je suis sûre qu'elle va accélerer pour tenter de me perdre. Raté ma grande, je comprends ce que tu dis. Bingo. La voila partie dans une explication au sujet des différences qui séparent nos peuples, du gouffre qui s'est creusé, de sa volonté de nous aider. Mais ta gueule un peu... J'acquiece, espérant déjà la fin de la nuit.

Nous aurons des invités un peu particuliers ce soir.

Influents? Riches?

Assez oui. Mais surtout particuliers au niveau de leurs gouts. Vois tu, ils... Enfin tu verras par toi même.


Mes sens sont en alerte. Ca s'était pas prévu. Je pensais juste devoir faire les deux trois trucs d'usage et les laisser crever d'extase sur un tapis. Ca sent le coup fourré...

Ou est Keld?

Keld? ton ami c'est ça?


Elle a prononcé le mot ami avec une hésitation. Elle se demande si chez les animaux, la notion d'amitié existe.

Il arrivera bientôt. Bien, prends tes aises, reposes toi, tu ne vas pas chomer ce soir...

Et elle s'éloigne avec un sourire mauvais, tournant son cul parfait dans tous les sens.
Pétasse.

Auteur : Keld
14/05/06 18h10 | 24 Volcan 3724

*ATTENTION, MESSAGE UN PEU RUDE*

Le Directeur m'a emmené chez ma "patronne". Putain, je hais ce milieu, ces belles voitures, ces salons luxueux. Ca sent le fric, la poudre, la décadence. Comment pourrait il y avoir un quelconque bonheur, si nos dirigeants sont aussi vides, manifestement désespérés au point de cacher leur néant sous ces dorures?

Je sonne à la porte. Une femme m'ouvre. Superbe. Froide.

Madame, bonjour. Je suis votre nouveau domestique. C'est l'agence ...

Je sais. Entrez.


Froide. Conne. Pas aimable pour deux sous. Mais salement baisable. Elle m'explique rapidement ce que j'ai à faire. Rien de compliqué. Elle me témoigne une condescendance à peine supportable. Elle me montre ma chambre, en insistant bien sur le fait que c'est une chambre "de domestique". Elle espère que je vais tirer la gueule? C'est propre, grand, lumineux. Plus que je n'ai jamais eut.

Je fais un peu de ménage, visite les lieux, m'imprègne de l'endroit. C'est froid, impersonnel, aussi vivant et beau qu'un cadavre recouvert de ses plus beaux amis pour son enterrement. Je vois quelques documents traîner, mais je sens le piège. Je les laisse tranquille, n'accordant pas un regard à mon but. Je passe le reste de la journée à traînasser dans l'appartement, m'occupant dès que je l'entends se rapprocher.

En début de soirée, elle m'appelle, me demandant une coupe de champagne. Je vais à la cuisine, sors de l'immense frigo une bouteille, la pose sur un plateau, avec une coupe. Je me dirige vers sa chambre. J'entends des cris et des rires. Pourtant, elle est seule. Je pousse la porte.

Elle est allongée, nue, sur son lit, à peine recouverte par ses draps de satin, manifestement, sa main droite est occupée. Sur l'immense écran plat, une vidéos porno. Manifestement amateur. Des mecs et des femmes occupés à brûler, baiser dans tous les sens une pauvre pute, qui, bien qu'elle ne crie pas, a l'air de dérouiller méchamment. Déguelasse. Je pose le plateau. Puis je vois le visage de la fille. J'arrive plus à respirer. Mes points se crispent. Je bredouille un truc, puis je sors. Je cours dans l'apartement.

Au diable les informations. Je ramasse tout le fric que je peux, récupère le flingue que je me suis acheté hier. Le charge. J'arrête de réfléchir. Je fonce dans sa chambre. Elle sourit en me voyant revenir, s'imaginant je sais pas quoi. Je ne lui laisse pas le temps de comprendre. Un coup de crosse dans la gueule. Sec. Assomée. Je déchire ses draps, la baillonne, l'attache. Je ressors, branche le répondeur. Je vais à la cuisine, récupérer un couteau.

Elle va souffrir, puis parler, puis souffrir. Sa belle gueule ne sera plus qu'un magma immonde avant que j'arrête. Mais elle va tout me dire, et restera en vie.

Quand elle se réveille, elle est attachée à l'une de ses chaises design. Ses yeux transpirent la terreur. J'ai remis mes fringues de zonard. Je commence à l'ancienne. J'aime pas faire ça, mais le visage couvert de foutre de Sistra m'en donne la force. Pointe du couteau sous les ongles, mouvement sec du poignet. Son baillon étouffe à peine ses hurlements.

Je vais enlever ton baillon, te poser des questions. Si tu répond bien, tout s'arrête. Sinon, ça va continuer. Encore et encore.

Elle me réponds. Me dit où est Sistra. Me parle de son "Plan", de son frère. L'enculé. Je la rebaillonne. Maintenant, le plus chiant. La vengeance.

Je la fous par terre et la viole. J'aurais préférer avoir vingt potes avec moi pour lui rendre ce qu'elle a fait à Sistra. Mais ca suffira. Ensuite, ses dents, à la tenaille, puis ses paupières, ses lèvres, son nez, ses oreilles, au couteau. Pour finir, au marteau et au tournevis, je m'occupe des os de ses mains et de son visage. Ses hurlements me glacent, mais ne m'arrête pas. Heureusement que je lui injecte régulièrement de sa coke, sinon, elle se serait déjà évanouie.

Le bonjour à ton frère, salope.

Je me nettoie de son sang. Son portable finit dans l'aquarium. Son téléphone fixe en miette. Je desserre son baillon. Je veux qu'elle vive. Elle finira par alerter quelqu'un, mais je m'en fout. Sistra n'est qu'à deux rues d'ici. Je sors. Je cours.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h11 | 24 Volcan 3724

Plus rien ne compte maintenant. Humiliation. Douleur. Putain de merde j’ai mal. Il m’ont trainée dans la boue, m’ont crachée dessus, battue. J’ai servi d’outil à leur moindre désir. Et j’ai fermé ma gueule. Ca a été la seule chose qui m’a permis de tenir, ces regards à la dérobée qu’ils n’arrêtaient pas de me lancer, espérant me voir craquer. Mais j’ai tenu. Qu’est ce que ça m’a apporté ? Rien de plus que la vie. Je vis encore, oui, mais pour combien de temps ?

D’un œil endolori par les coups et le mal de crâne conséquent de ce qu’ils m’ont fait avaler, je regarde ma cellule. Car ils ont fermé la porte, les enflures. Une petite table, un miroir, du maquillage, et mes objets de torture de la veille. Rien qu’à les regarder, j’ai mal. Je m’assieds sur le lit, entourant mes genoux de mes bras, et je me force à pleurer, seule, nue. Je n’y arrive pas. Alors je me lève et marche vers le miroir. Les enfoirés, ils ont achevé de me réduire à l’état de loque. Je me fixe longuement, me reconnaissant à peine. Je me dégoutte. Je le frappe, de toutes mes forces, jusqu’à ce que ne plus voir mon reflet, qu’il ne soit plus qu’un petit tas de verre.

Je me sens sale. Je veux que la mort m’emporte. Elle ne veut pas de moi. Je prends un morceau de verre, et là où le sang a à peine cessé de couler, je déchire de nouveau. J’ai mal, mais je ne m’arrête pas. Je regarde mon liquide vital se perdre, je l’étale, et je taille de nouveau. Je crois que j’ai touché une veine. Je cri, lève la tête vers le plafond et m’appuie contre un mur, le morceau de miroir toujours serré dans ma main. Et d’un mouvement fatigué, je me tape l’arrière de la tête contre le mur.

PUTAIN


Est il donné de haïr quelqu’un aussi fort que ça ? Surtout quand ce quelqu’un, c’est moi-même ?

Misérable, faible, je ramasse mes fringues et les mets sur mon dos. La mallette en tombe. Je l’avais oubliée. J’espère que ça suffira à Keld. J’enroule mon bras blessé d’un torchon qui traîne, et j’ouvre la fenêtre (la porte est fermée à clef). Je suis à 15 mètres du sol, mes seules prises sont des gouttières et des trous dans les murs. Je me lance, rien à perdre. Tout se passe plutôt bien, mon équilibre ne me fait pas défaut malgré la quantité de daube que j’ai dans le sang. Heureusement.

Des bruits de pas. Quelqu’un court dans ma direction. Keld ! Il me reconnaît. Je lui lance mon sourire le plus convainquant et saute sur un muret. Pas de chance, il est instable. Chance, Keld est rapide. Il me rattrape. Ma cheville me fait souffrir. Mon corps me fait souffrir. Ma tête veut que je crève. Moi j’explose de rire.

Alors du nouveau ?

Il a l’air grave, triste. Il a du sang sur ses fringues.

Sis…

Oui ??

Ca va ??


Ironie ? Je n’en sais rien. Je lui souris de nouveau, m’entaillant le cœur.

Je suis en retard sur mes règles, mais ça roule. Et j’ai ça pour toi.

Je lui tends la mallette et baisse les yeux. Priant je ne sais qui – ce qui devient une habitude – qu’il ne soit pas au courant.

Auteur : Keld
14/05/06 18h11 | 24 Volcan 3724

Je la regarde. J'ai mal au coeur. Elle s'efforce de rien me montrer. Putain. Je me serais déjà tirer une balle si ça n'avait pas eut pour conséquence de la laisser seule. Je lui prend la malette des mains. Je la prend sous mon bras, et cours avec elle, au hasard. J'essaye de retenir mes larmes. C'est pas moi qui ais dérouillé cette fois, alors je dois pas faire ma guimauve. Mais c'est dur. Elle boite aussi. On avance pas vite. Mais au bout de deux heures, moitié courant, moitié boitillant, je regarde autour de moi.

On est à nouveaux hors de la ville, pas sur les hauteurs, mais aux abords du désert, dans les friches industrielles. C'est calme, il n'y a personne ici. On s'effondre. Elle me lance un regard interrogateur, en essayant de reprendre son souffle. Je prends une grande inspiration.

Ca a servi à rien. On s'est fait avoir. Le directeur, c'était le frère de la femme qui... de la soirée. C'était un pauvre plan à la con, une machination. On était des pions. Merde, je... je... Oh... Sistra. Elle a payé pour... tout ca, je te jure qu'elle a payé!

Elle a un pauvre sourire, digne, essaye de masquer avec ses manches ses coupures, avec son col les brûlures de cigarette. Je vois le pendentif. "Ca sera mon talisman". Pas très efficace. Je sais pas pourquoi, mais ça réveille tout. La douleur de maintenant, mais aussi celles d'avant. Toutes les plaies se rouvrent, en même temps. Je m'effondre à genoux. Je pleure à ses pieds, incapable de lui demander pardon, incapable de trouver la moindre justification à tout ça. Tout s'embrouille. Je ne peux plus que pleurer, misérable, honteux, fou de douleur...

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h13 | 24 Volcan 3724

Keld...

Je pose une main hésitante sur son dos tremblant.

Keld, arrête. On est trop près du but pour laisser tomber.

Il ne s’arrête plus, comme si toutes les peines accumulées au cours des derniers jours sortaient d’un coup. Le voir dans cet état me donne envie de chialer aussi, mais je me retiens. Je m’agenouille près de lui, essaye de croiser son regard. Je le sers dans mes bras, embrasse son visage.

Keld…

Quelle conne. Répéter son nom n’avancera à rien.

Je t’aime moi.

D’un coup, il s’arrête de pleurer. Il me regarde, les yeux rouges, et se met à rire, d’un rire de dément.

Te moque pas.

Tu es mignonne.


Il me parle comme à une gosse. Je supporte pas ça. Je me tais et me tourne vers Lievanta, serrant toujours me manches. D’ici on peut voir notre territoire. On dirait que ça s’agite par là bas.

Euh, ils font quoi ?

Il m’explique ce que Shkaliah lui a dévoilé. Le frère et la sœur ont un projet, totalement fou, mais de plus en plus réalisable.
Ils veulent créer des camps de travail forcé, où nous serions exploités et brûlés à petit feu. Et nous, pauvres cons, on les aide. Avec nos protestations, on avance leurs projets.
Ca me retourne de l’intérieur. Je ne sais pas quoi dire.

On fait quoi ?

Sis… Il n’y a plus rien à faire…


Je baisse la tête et murmure.

Alors c’est tout ? On se plie, on rampe ? Après tout ce qu’on a traversé, on se jette à leurs pieds ? Et ton esprit révolutionnaire ? Plus on avance, et plus je vois que ça peut nous mener quelque part.

Nous menez où Sis ? Tu es jeune, tu es naïve.

Arrête avec ça. Arrête. On pourrait….

On pourrait quoi ? Mais merde, j’ai essayé de changer les choses, tu vois où ça nous a menés ?? La seule chose qu’il reste à faire c’est….

TAIS TOI. Et que fais tu de tes belles idées, hein ? Que fais tu de ta force ? Merde Keld, j’en ai trop chié pour m’arrêter là, je…


Je ne peux pas terminer ma phrase, je tombe à genoux et me mets à vomir. Un mal terrible me prend aux tripes. J’arrive plus à respirer, je tremble.

Sis ?

J’ai mal….

Auteur : Keld
14/05/06 18h14 | 24 Volcan 3724

Je lui tiens les cheveux le temps qu'elle finisse ce qu'elle a à faire. Puis, je m'éloigne un peu, et allume une clope. Je pense à tout ça. Je me sent con de l'avoir traité comme une gosse. Elle n'en est définitivement plus une. Je termine ma clope, et vais la retrouver.

Désolé, Sis. Je t'ai mal parlé, et j'ai un peu flanché. Il faut réfléchir à quoi faire, mais là, j'avoue que je suis à cours d'idée. Si tu en as, je t'écoute.

On parle un peu, mais l'impasse est manifeste. On est recherché tous les deux, et quoi qu'on fasse, on ne fera que les rapprocher de leur objectif. D'un autre côté, je crois que la femme est suffisement amochée pour qua ça ruine un peu leur projet. Le mieux qu'on est à faire, c'est encore attendre et voir. Là dessus, on est d'accord.

Ensuite, on ouvre la malette. Même si on sait que c'est du vent, on pourra toujours récupérer des noms. On prend les papiers interessants, et on balance le reste. La nuit est tombée, on a faim. Je l'installe du mieux que je peux sur mon blouson, et pars à la recherche de trucs intéressants. je trouve une vieille pompe à eau, et remplis une bouteille. Je reviens près d'elle, elle pleure en silence.

Je la déshabille aussi doucement que possible. Elle se laisse faire. Je constate l'empleur du désastre, et je sens une boule se former dans mon ventre, remonter, et rester coincée dans ma gorge, mais je dis rien. J'imbibe un peu d'eau un bout de tissus, et nettoie doucement ses plaies. Elle geint doucement.

Je l'installe aussi bien que possible dans la petite niche entre deux murs où l'on s'est installé. Je me couche contre elle, l'enlace aussi tendrement et légèrement que je peux. Elle me tourne le dos, honteuse. Je sens son dégout pour elle même. Je la serre un peu plus fort, et la recouvre sous nos manteau. J'embrasse tout doucement son cou.

Tu es beaucoup plus belle qu'elle. Plus belle que toutes ces putes dorées des beaux quartiers.

Elle ne dis rien. Mais je sens son désespoir, et il me donne froid.

Si tu veux, on peut partir. Je veux bien tout plaquer si tu me le demande. Penses y. On parlera de ca demain. Et c'est pas grave, pour... pour tes retards.

Elle se tourne à moitiée.

Pourquoi tu me dis ça?

Ces yeux sont brillants de larmes dans l'obscurité. Nous y voilà. Ca m'arrache la gueule de le lui dire. Pas que je le pense pas. Mais ça implique trop de chose. Tant pis: j'ai pas eu beaucoup de livres, mais je sens un parallèle entre nos vies et mes lectures. On a passé le point de non retour, on se rapproche de la fin, du dénouement. Je le sens dans mes tripes. "The bitter end", ais je parfois lu. C'est exactement ça. Demain, ou après demain, tout sera peut être finit. Il vaut mieux que je le lui dise maintenant, tant que je le peux.

Je t'aime, Sis.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h14 | 24 Volcan 3724

Alors c’est ça, l’amour ?
C’est ça toutes ces conneries décrites dans les bouquins ? Ca me fait drôle de me dire que, les derniers jours que je passerai sur cette terre que j’ai tant haïe, tant désiré quitter, seront ceux qui m’y accrocheront le plus. J’aime. Je me sens niaise. Mais pourtant si bien. Il est près de moi, et je peux tout affronter.

Toutes mes peurs, pour cette nuit s’envolent. Je ne crains plus la douleur, je ris du ridicule, je fends les barreaux de ma prison, je repousse le froid qui me ronge. Je vis. Je vole. Il m’aime.
Je sens ses caresses. Je veux m’offrir à lui. J’oublie mon dégoût. Je lui ouvre mon corps. Et il y rentre. Il y rentre doucement, il ne veut pas me faire mal, surtout pas, et ça se sent. Nous nous embrassons, nous enlaçons, devenons un corps, une âme.

Je m’appelle Sistra, j’ai dix sept ans. Je suis une gamine des rues qui veut aider les siens, donner un avenir à des enfants qui n’en ont pas et réaliser les rêves que je peux. Car j’aime, et je suis aimée.

La tête me tourne, mais c’est agréable. Le collier qu’il m’a offert rebondit contre ma poitrine tandis qu’il fait partie de moi. Nous pleurons tous les deux, puis nous rions. Nous sommes libres, nous sommes je. Et nous nous aimons.
Putain ce que c’est bon. C’est comme dans les contes de fées, les fins heureuses.

Je me surprends à vagabonder dans des espoirs fous. Tout devient réalisable. Nous sommes heureux. Nous avons un enfant. Car je le sais maintenant, ça ne peut être que ça, j’attends un petit. Il n’est pas de lui, mais nous ferons comme si. Nous avons une maisonnette, petite, mais emplie d’amour. Nous vieillissons loin des bruits de la guerre, loin de la tristesse de notre quotidien actuel. Il travaille, moi aussi ? Le soir, j’ai peur lorsque, une minute après l’heure prévue, il n’est toujours pas arrivé. Je l’attends, aimante, toujours.

Et nous nous quittons, fatigués, mais heureux. Il s’endort vite, il doit se remettre. Moi je ne peux pas. Allongée sur le dos, je regarde ces étoiles qui ont toujours été là, unique chose n’ayant jamais changé autour de moi.
Je rigole doucement, pour moi, pour me soulager. Je pense des conneries, je me sens pimbêche.

Et là, ça me reprend. La vie me fout une gifle, l’air de dire « hey réveille toi ma vieille, c’est fini le rêve ». Et elle a pas tort. Toutes ces idées stupides qui m’ont réchauffée s’évaporent, ne résistant pas à…tout ça. La douleur revient, le froid me paralyse, et la haine me transperce. Haine contre lui, contre eux, contre moi. J’ai lu quelque part : « Si la vie tourne à l’envers, c’est peut être toi qui la prend dans le mauvais sens », ou, peut importe, une autre connerie du genre visant forcer les gens à se remettre en question. Je l’applique. C’est peut être de moi que tout viens, au final. Serait ce plus simple si je n’étais pas là ? Cette pensée me bouffe ma dernière volonté de dormir près de lui. Je me lève, marche un peu. J’ai de plus en plus mal. Les derniers doutes s’estompent : je suis enceinte, et pas d’hier.

Je fais quoi maintenant ? Réveiller Keld ? Non. C’est ma merde, j’ai déjà foutu trop de monde dedans. Si mes souvenirs sont bons, nous sommes près de la vieille décharge de Lievanta. Ce ne sont pas les objets pointus qui manquent. Je me mets en route, et me retrouve assez vite là où je le souhaitais. Parfait. Je trouve une aiguille à tricoter. Ca me fait marrer. Comme s’il restait à Lievanta une personne qui sait manier ça…

Auteur : Keld
14/05/06 18h15 | 24 Volcan 3724

Elle est partie. Le froid de l'aube me réveille, et je m'étire. Bon. Je la cherche un peu, mais en vain. Pas plus mal qu'elle soit partie. Maintenant que le vin de la vengeance est tiré, il le faut le boire jusqu'à la lie. Je fais mes poches. 3000 Shinyens. Bon. Je réorganise mes pensées, en regardant le soleil se lever sur les entrepôts désafectés.

Si Sistra n'est plus là, c'est qu'une petite vie rangée loin d'ici ne lui dit pas. On est recherché tous les deux. Je me ferai choper, de toute façon, après avoir massacré l'autre pute, je dois avoir la moitiée de la ville au fesse. Alors, foutu pour foutu, autant faire diversion, ça laissera une chance à Sistra.

J 'ai plusieurs choses à faire. D'abord, aller dans la zone. Je connais un médecin radié de l'ordre qui pourra me filer un coup de main. Trois heures de marches, par la décharge et les taudis, et je retrouve le Docteur krupp. Il balise en me voyant, mais le pouvoir de persuation de 200 tickets est sans appel. Ce que je lui demande est simple. Un petit trou dans la cuisses, on y met un tout petit sachet stérilisé contenant 5 pillules de morphine concentrée. Une pillule pour résister à un interrogatoire, trois, et tout s'arrête. Il rabat la peau sur cette petite cache à l'intérieur de mon corps, recout, et cautérise. On dirait une petite brûlure. Ca fait mal, mais ca reste vraiment supportable. Je lui prends quelques pensements, que je me mets sur un coin du visage. Ca, plus mes fringues de rupin, ca devrait me permettre de me balader dans les beaux quartiers, au moins aujourd'hui: ils me cherchent sûrement dans la Zone.


Je commence par louer une voiture, avec les faux papiers que "le directeur" m'a donnés.
Je file ensuite dans le quartier commercant, à la recherche de drogueries et quinquailleries. Je prie pour que Sistra ne fasse pas de connerie. Je fais plusieurs magasin, et repard vers les entrepots, délesté de plus de mille Shinyens.
Je m'installe, et regarde mes emplettes: un réchaud, des marmites en aluminium, trois bombonnes de gaz, des sachets de clous, de la colle, un bidon de glycérol, un jerrican d'essence, une bouteille de gélatine alimentaire, un barril d'acide nitrique, un autre de soude. On va rire.

Le reste de la journée est passée à mélanger glycérol, soude et aicde pour obtenir de la nitro, à fabriquer un barril de napalm, et à me bricoler trois mignonnes petites bombes à clou. Je vais me faire gauler, mais ca sera spectaculaire.

A la nuit tombée, j'ai terminé mes bombes et leurs amorces. La nitro est pour le mur de l'un de leur camp. Avec un peu de bol, des journalistes viendront, et ca mettra la merde, et ça fera sortir quelques prisonniers. Les trois bombes, c'est pour eux. Ils sauront quoi nen faire pour s'en tirer avec.. Le napalm, c'est pour ma voiture de location. Je la garerai devant le 5ème bureau. Avec un peu de chance, je ferai quelques morts. Il n'est plus question de changer quelque chose. J'ai repensé à tout ça, cette nuit, au plan de ces deux enflures.

Ca avait leur bien préparé. La seule chose que je peux tenter, c'est de les prendre de vitesse. De précipiter les évenements. De faire ce que je suis pas sensé faire. Là, je suis sensé me cacher avec Sistra. Perdu. Je ferais tout péter, et je me ferais attraper. Avec un peu de chance, ça mettra leur plan à l'eau. Ca arrangera rien, mais les choses empireront pas. Je croise les doigts, et démarre la voiture.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h16 | 24 Volcan 3724

J’ouvre les yeux. Je ne reconnais pas l’endroit. Ca ne m’inspire pas trop… Je pars à la recherche d’un visage connu. Des zonards. Bon au moins je ne suis pas dans Lievanta.

Elle se réveille !!

Une gamine avec des tresses mal faites se penche sur moi.

Heureusement que je t’ai trouvée hein ! T’avais pas l’air bien !

Elle m’a trouvée… Je tente de rassembler mes pensées. Keld... J’ai envie de parler, mais aucun son ne sort… Merde j’ai mal au crâne… Qu’est ce qu’il s’est passé déjà ?
J’étais à la décharge, je voulais me débarrasser de cette chose qui grouille en moi, et j’ai…
Putain de corps, trop faible, trop effrayé par la douleur… J’ai du tomber dans les vappes…

La petite remarque mon agitation et appelle quelqu’un, une femme à l’air doux, serein. Elle s’agenouille près de moi et soulève ma tête.

N’essayez pas de parler, c’est inutile.

Inutile ?? Qu’est ce qu’elle me chante là ??

Vous êtes chez les Slembs.

Merde ! Là je commence à paniquer. Les Slembs, je sais ce que ça suppose. Déjà qu’en temps normal on s’aime pas trop, mais là on a carrément tuer leurs chefs… Les cognes ont du en remettre une couche pour qu’on s’entretue… Je veux bouger, mais je ne le peux pas. Ils m’ont attachée ?? Les enfoirés. Ok, reste calme…
Qu’est ce que je risque au plus ? La mort ? Merde les Slembs… pas eux… Ils sont réputés pour leur maîtrise d’ustensiles divers. Je décide d’écouter parler la femme sans trop bouger.

Je sais ce que vous pensez, votre peur se ressent. Et ce serait mentir de dire que vous avez tort. Vous avez été reconnue, Sistra. Nous savons ce que vous avez fait à Blentio et Leiel.

Sa gorge se serre. Elle m’explique que le cadet était son fiancé. Sur le coup je me sens mal. Puis elle me parle de l’évolution des choses. Les flics prennent de plus en plus de pouvoir. Il y a eu une révolte, de la casse de notre côté. Apparemment l’état a décidé de nous rayer de la carte, quitte à y mettre les moyens. Elle me parle d’une pétasse qui visiblement manipule pas mal, qui se serait faite méchamment enrayer par un zonard. Et elle me parle de la mise à prix sur nos têtes. Merde. Ils veulent me livrer, c’est pour ça que je suis encore en vie.
Elle m’apprend aussi que mes cordes vocales ont été amochées. Je ne peux pas leur en vouloir, j’aurai fait mille fois pire si quelqu’un avait fait du mal à Keld. Et de la mort de mon « enfant ». J’ai réussi mon œuvre avant de perdre connaissance.

Un homme rentre, il s’accroupit près de moi et prends mon visage entre ses mains. J’ai envie de lui dire d’ôter ses sales pattes de là, de lui cracher dessus. Mais ça ne ferait qu’agraver mon cas. Je me laisse faire, l’écoute me parler, le regarde me déshabiller, impuissante. Je pleure.

Je vois la nuit par l’unique petite fenêtre de ma petite cellule de fortune. Je suis seule, la ville dort autour de moi. J’ai enfin repris le contrôle de mon corps. Je me balance d’avant en arrière pour ne pas avoir trop froid. Ils ont peur, tous. Je peux le sentir. Ils savent ce qui les attend. Certains hésitent à trahir, fuir, retourner entre les murs de Lievanta. Je regarde vers l’avenir. Pour moi il sera bref : je serai vendue et devrai subir la vengeance de l’autre salope en attendant que la mort m’accepte. Pour les zonards, ce ne sera qu’une descente aux enfers. Plus ils se révolteront, plus ils en chieront. Ils finiront esclaves dans un camps-poubelle, deviendront ces animaux que les habitants de Lievanta imaginent.

Un bruit attire mon attention. La gamine qui m’a trouvée. Elle est en train de m’ouvrir.

J’ai vu que tu étais triste. On dirait un oiseau. Alors je te libère pour que tu t’envoles.

Brave môme. Ca me fait mal au cœur de la voir, petite créature brisée, accusant les coups, destinée à subir cette merde jusqu’à ce qu’on lui en fasse vivre une pire. Elle m’aide sans même savoir pourquoi. Je la sers contre moi et dépose entre ses mains mon unique bien : le médaillon dont Keld m’a fait cadeau. Elle rigole et me le remet autour du cou.

C’est bon, j’ai pas fait ça pour un cadeau. A ta place je partirai vite.

Et c’est ce que je fais. Je pars en courant, faisant fis de la douleur. Lievanta est bien plus proche des Slembs que je le pensais. J’escalade le mur pour la dernière fois, repassant par l’endroit où Bratt et moi sommes passés il y a quelques jours. Pauvre Bratt… Putain je les hais tous…

Ma première cible est Blemp. Trop d’illusions volées à cause de ce connard.

Auteur : Keld
14/05/06 18h16 | 24 Volcan 3724

Je roule jusqu'à la zone, en passant par l'extérieur. Je suis en haut d'une butte. Je peux voir un des camps en contrebas. Ca fera l'affaire. La voiture descend doucement. Je l'arrête en vue du mur. Trop de gardes. Je pourrais pas m'approcher. Je réfléchis. Tant pis pour mes projets. J'amorce toutes les bombes dans la malle, puis bloque l'accélérateur avec mon sac à dos. Je saute de la voiture. Elle cahote jusqu'au mur, des gardes courent vers elle... Les cons.

Une grosse déflagration, une pluie de gravats. Je lève un oeil. Le mur est percé, des gardes courent en hurlant, recouvert de napalm. Moche. Il y a de la fumée. Je cours. Tant qu'à y être, autant être sûr de sortir quelques prisonniers. Je passe la brèche.

Boue, merde, baraquements. Regards hébétés, déshumanisés des prisonniers.

Sortez! Vite!

Quelques uns, les plus frais, se mettent à courrir. Les autres restent là, stupidement. Je jure. A peine une vingtaine a pris la fuite. J'entend une pétarade. Mirador, mitrailleuse. Je me rapproche, sors mon flingue, et tire une dizaine de balles au hasard. La mitrailleuse se tait. Mais des bruits de bottes m'indiquent que d'autres gardes arrivent. Quelques prisonniers supplémentaires comprennent qu'ils puivent fuir, et se mettent à détaler. Je me mêle à eux.

Rafale de pistolet mitrailleur. Je m'effondre. La jambe. La douleur me fait perdre conscience...



Je reprend conscience sur le sol bétonné d'une cellule. Devant moi le directeur, le visage déformé par la haine. Je trouve le courage de faire une vanne.

Comment vas ta soeur?

Il est sur le point de hurler. Je me marre.

Faites le souffrir. Je veux que demain, au peloton, il n'est plus la force de faire le malin.

Il se tourne vers moi, le visage radoucit.

Nous avons gagné, Keld. L'Ordre Nouveau est en place. Les petits zonards dans ton genre sont déjà entrain de croupir et de crever dans les camps. Tu.as.perdu.

J'imagine bien la scene. Défilés, drapeaux, chants et guerres. Fais chier. Je souris. J'ai fais ce que j'ais pu. C'est déjà ça. Ils sortent tous. Je me souviens de la morphine. Je déchire ma plaie, en retenant mes cris. Je sors le sachet, et deux pillules. Je les gobes. Ca m'aidera à tenir. Je remet le paquet dans ma plaie, et la feme avec un pensement. Pourvu qu'ils n'y pensent pas. Déjà, on revient. Trois matons m'emmenent à travers des couloirs, alors que mes perceptions se faussent, sous l'effet de la drogue.

Salle blanche, néon. Chaise, table, baignoire. Ca commence. Je gueule, pas par douleur, mais pour donner le change. Fils électriques sur les couilles, éclisses sous les ongles, brûlures, trempette. La totale. Ca s'arrête. Je suis dans ma cellule. Mon corps ne m'obéit plus. Je ne vois pas le soleil se coucher, je m'endors, fiévreux. "Tout est perdu" est ma seule pensée.

Des pas. Ils viennent me chercher. Je me réveille. J'ais mal. Je prends une morphine, manière de rester digne. Dix matons. Putain, ils me croient capable de m'enfuir après la scéance d'hier? Je marche avec eux jusqu'à un fourgon. Je tourne mes pensées. La morphine m'aide à ne pas pleurer, ni supplier. Je veux pas mourrir, mais j'accepte les choses. En fait, je verrais presque le bon côté de la situation. Je me sens nerveux, mais ça va. Bientôt, tout sera terminé, et l'après ne peut pas être pire. Je pense à Sistra. Je suis un peu triste, mais ça va. Les matons parlent. Il y aura plusieurs milliers de personnes.
Pourvu qu'elles soient haineuses! Histoire que les choses se passent dans les règles. Je souris. Je ferme les yeux, et prie je sais pas qui de me donner la force de mourrir dignement. Au moins ça. J'ais peur. Mais ca va aller.

Le fourgon s'arrête. Le murmure de la foule empli soudainement le véhicule, alors que les portières s'ouvrent. Un hurlement de haine traverse la foule, qui gronde, cri, crache. Je rentre la tête dans les épaules. Je vois ma dernière destination. Une plateforme de 20 mètres de côtés. 20 soldats, un sergent, un pilier.

Ca va aller, ca va aller. J'essaye de me persuader, mais morphine ou pas, j'ai peur. Le directeur est là, qui achève un discours. Ordre nouveau, plus de racaille, camps, expansion, et tout le tralala. Bon. Alors que je monte les marches, j'entrevois un visage dans la foule. Et tout va bien. Elle est en vie. Elle s'en est sortie. Ils n'ont plus besoin d'elle. Elle peut encore s'en sortir. La morphine aidant, je me sens mieux, bien, prêt. Je suis en haut. Je regarde la foule alors qu'on m'emmène au pilier. La place du Parlement est noire de monde, immense foule, oeil avide de sang et de mort. Ne la décevons pas! Je cherche Sistra du regard, la trouve, et lui envoie un sourire. J'espère qu'elle l'a vu, et qu'elle comprendra qu'elle doit vivre. Pour moi, pour le petit.

On m'attache. On approche un bandeau. Je le refuse. Je veux les regarder, LA regarder quand elle va venir me chercher. Je demande une clope. On me la donne. C'est pas facile de fumer sans les mains, mais ça me réconforte encore un peu plus. Quelqu'un lit ma condamnation tandis que le sergent accroche un papier sur ma poitrine, pour aider les tireurs. Tout devient meilleur, tout à coup. Le bruit de la foule en colère, le vent, la lumière, le goût acre de la clope, toutes ses sensations me grisent. Mon esprit vient de comprendre que c'était terminé, et me fais profiter au maximum de tous mes sens une dernière fois. Je le remercie.

Ils s'alignent. Je me redresse... "Show must go on".

En joue!

Je crache ma clope, et affiche un sourire.

Feu!

Je force mes yeux à rester ouvert. Rideau.

Auteur : Kalyso
14/05/06 18h17 | 24 Volcan 3724

Des fois, on se dit qu’il ne peut y avoir pire situation que la notre. Alors la vie se charge de nous démontrer le contraire. Des mes expériences ces dernières semaines, je peux l’affirmer.

J’étais une gamine des rues affamée. Pour changer cela, je suis passée par des épreuves que je ne souhaite à personne. J’ai défié le destin, dansant avec la mort. Je me suis battue, j’ai été haïe, j’ai pleuré mes frères, fait pleurer ceux de mes ennemis. Je suis tombée amoureuse. J’ai vécu et compris en si peu de temps des choses qui nécessitent parfois plusieurs vies pour être rencontrées.

Pourquoi ? Pour sortir une bande de délinquants d’une merde où ils se sot foutus eux même ? Donner un avenir à une bande de mômes destinés à crever prématurément une arme à la main ? Non. Je suis bien trop égoïste pour ça. En revanche je suis trop hypocrite pour ne pas m’être rendu compte du mensonge que j’offrais à tout le monde – moi-même en premier – en acceptant de croire que ces raisons de vivre étaient les miennes.

Tout ça, je pense que je l’ai fait en premier lieu par amour. C’est con hein ? Surtout que j’ai toujours clamé haut et fort que l’amour n’est qu’une excuse permettant la réalisation de trucs dégueulasses sur une personne officiellement désignée pour ça. Paf, je suis tombée en plein dedans.

Mon corps quant à lui est devenu un objet façonné par une volonté de contrôle permanent. J’ai souffert, sûrement perdu des litres de sang, et en est fait couler pas mal. Je sens encore tous les trucs immondes qui sont entrés en moi. Je me suis faite baiser dans tous les sens du terme.

Tout ça pour quoi ? Un regard ? Un baiser ? Qu’importe. J’ai tout perdu.
Je ne suis plus qu’une enveloppe charnelle absolument vide, et déchirée. J’ai traversé de la vie ses pires côtés : la douleur, la faim, l’humiliation, le froid, la tristesse, la mort. Et l’amour.

Maintenant, il me reste une multitude de choix à faire. Mais au final, deux issues. Continuer de vivre, nourrie de faux espoirs, ou crever. Perso je préfère la seconde solution. Moins fatigant que de continuer à me traîner dans ma lassitude, m’enlaidir et perdre le peu qu’il me reste au nom de…de rien.

Un regard en arrière. Je ferme les yeux et vois concrètement ce qui m’a amenée là où j’en suis. Mais où en suis-je réellement ? Perdue, quelque part, à un point de non retour.
Pourtant mon œuvre est achevée. J’ai détruit ceux que je devais détruire. Je souris en pensant cela. La destruction, c’est pour ça qu’on avance ?
Je suis arrivée chez Blemp. Il n’était pas là. Qu’est ce que j’ai pu le haïr, ce sale traître. Je l’ai haï, car il nous a fait des promesses. Sa vie nous semblait si idyllique…
Je suppose que Keld est passé par là, avant moi.

Puis je suis allée à l’hôpital. J’ai débusqué cette salope, comme une furie. J’ai tout retourné dans sa chambre, et je l’ai tuée. D’un coup de dents dans la carotide. Son sang dégueulasse est encore au fond de ma gorge.

Puis j’ai suivi son frère, jusqu’ici. Ca n’a fait qu’un tour en moi, lorsque j’ai vu la scène.
Alors il s’est fait prendre…
Je vois la jouissance sur leurs visages à tous. Ca me débecte. Ca y est, ils la tiennent leur raison de nous exterminer. J’aimerai crier quelque chose. Rien ne sort. J’avais oublié. Je rigole intérieurement, c’est nerveux.

Il n’a pas un regard pour moi. M’a-t-il vue ? Difficile à dire, nous sommes des milliers.
Dehors, c’est l’anarchie. Les zonards ont pris la ville. Les flics la zone.

Rapide, je me faufile. Je saisis une arme dans la ceinture d’un garde sans même qu’il le remarque. Pauvre con. Si tu savais où tu vis…
Aknahau est à portée de tir. Des ministres, des dirigeants, nombreux sont ceux qui se sont déplacés pour voir crever un minable zonard. Je tire. Une fois. Le choc me repousse en arrière. Je vide mon chargeur. Qu’il ne soit pas reconnaissable. Aknahau s’effondre. Je tombe avec lui.

Je prends mon souffle, effleure du bout des doigts la marque du médaillon gravée dans ma chair, et cours. Je bouscule, provoque des protestations. Qu’importe. L’ordre de ne pas arrêter la cérémonie est lancé. Coûte que coûte. La première détonation résonne, la seconde. Je cours, m’élance. Plus de larmes sur mes joues, plus de souffrance dans mon corps.

J’arrive au pied de l’estrade funeste, et m’abandonne contre Keld. Est il encore en vie ? Bruit de tir, la première rafale me traverse, je suis secouée de tremblements.
Je ne vois pas ma vie défiler devant mes yeux. Je ne veux plus connaître ma première histoire, celle qui précède la vraie, dans la zone. Je ne crois plus que tout peut se remettre en place. Je n’offrirai plus d’avenir à personne, et ne vivrai pas avec lui. Je ne pourrirai pas non plus dans un caniveau. Mais je serai un douloureux souvenir dans la mémoire de beaucoup.

Mon regard croise le sien.